Un médecin qui a examiné Francis Proulx, deux mois après le meurtre de l'attachée politique Nancy Michaud, a constaté chez lui des troubles du jugement.

Le psychiatre Jacques Talbot a affirmé lundi que Francis Proulx, accusé de meurtre prémédité, démontrait une «indifférence amusée» qui était surprenante étant donné sa situation.

M. Talbot, qui a témoigné pour la défense, a observé que Proulx n'était ni triste, ni anxieux, mais qu'il parlait abondamment et sans retenue de détails incriminants.

«Chez M. Proulx, tout sortait sans frein, les choses incriminantes ou anodines sur son comportement, de façon très spontanée, sans attitude réticente ou d'état émotionnel», a-t-il dit au jury.

Le médecin a rencontré Francis Proulx au début du mois d'août 2008, alors que l'accusé était en détention à Montréal, pour évaluation par un autre psychiatre, Louis Morrissette.

Proulx est accusé d'avoir tué avec préméditation Nancy Michaud, dont le corps a été retrouvé à Rivière-Ouelle, dans le Bas-Saint-Laurent, en mai 2008.

Observant les tics nerveux de l'accusé, M. Talbot a diagnostiqué qu'ils étaient causés par le syndrome de Gilles de la Tourette.

Lors de la consultation, Proulx a mentionné au médecin qu'il lui arrivait, depuis 2007, d'avoir des comportements impulsifs qu'il ne comprenait pas. Il lui a notamment raconté qu'il avait ainsi volé des enjoliveurs de voiture, coupé des arbres et fait du vandalisme dans un chalet.

M. Talbot a associé les comportements obsessifs-compulsifs et les troubles de jugements «très importants» de l'accusé au syndrome de la Tourette.

Devant l'état du patient, le psychiatre a émis l'hypothèse, sans établir de diagnostic ferme, que l'Effexor, un anti-dépresseur prescrit à l'accusé depuis 2006, puisse être en cause.

Lors de la deuxième de trois consultations, qui se sont échelonnées sur trois semaines en août 2008, M. Talbot a proposé à Proulx de cesser d'utiliser ce médicament.

«Il a refusé parce qu'il se sentait mieux et bien en le prenant», a-t-il dit.

Après sa première rencontre avec Proulx, M. Talbot a discuté du cas de l'accusé avec le docteur Morissette, qui témoignera pour la défense à titre d'expert, lundi après-midi.

«Je lui ai parlé de mes observations concernant le syndrôme de la Tourette, qu'il s'agissait d'un cas compliqué, mais ce n'est pas allé plus loin», a-t-il dit.

En contre-interrogeant le témoin, le procureur de la Couronne, James Rondeau, a fait reconnaître au médecin que la dose de 225 mg d'Effexor prescrite à Proulx était «thérapeutique et normale».

En fin d'avant-midi, Jean-Paul Prévost, qui avait accueilli Proulx lors d'un stage dans son atelier de soudure, est venu raconter le voyage de pêche qu'ils ont fait ensemble par la suite.

M. Prévost a décrit l'accusé comme une personne réservée, timide mais sympathique. Il l'avait invité à se joindre à des membres de sa famille pour aller pêcher sur la Côte-Nord, vers 2003.

«C'était un gars bien correct, a-t-il dit. Il avait l'air sympathique. C'était un gars comme les autres gars.»

Selon M. Prévost, Proulx était peu sorti du Bas-Saint-Laurent, et lors de la traversée du fleuve en bateau, il est demeuré sur le pont pour regarder le paysage.

«Il était capable d'apprécier ce qui était beau, a-t-il dit. C'est pour ça que ça m'a fait plaisir de l'emmener.»

Par la suite, Proulx a donné le nom de M. Prévost lorsqu'il a fait une demande d'emploi dans une entreprise où il a travaillé jusqu'en 2007.

«Je leur ai dit que c'était un petit gars bien correct, qui n'avait pas beaucoup travaillé et qu'on ne pouvait pas lui faire faire n'importe quoi, mais qu'il n'y aurait pas de problème avec des «jobs» répétitives», a-t-il dit.

En quittant la barre, M. Prévost s'est arrêté quelques secondes pour regarder l'accusé derrière le box vitré.

Plus tôt lundi matin, Raynald Bonenfant, qui faisait les rapports d'impôts de Proulx, a déclaré au jury que l'homme de 29 ans lui avait semblé très méfiant quelques mois avant le meurtre.

«Il se méfiait de tous et chacun», a-t-il dit.