Francis Proulx n'avait jamais eu de relation sexuelle avec une femme avant de violer le cadavre de Nancy Michaud.

L'homme de 29 ans a fait cette confidence à un codétenu avec qui il partageait sa cellule au centre de détention de Rimouski l'été dernier. Ce codétenu, André Dubé, est venu témoigner hier au procès de Francis Proulx, accusé du meurtre prémédité de Nancy Michaud, au palais de justice de Québec.André Dubé a partagé la même cellule que Proulx pendant quatre jours dans le secteur «protection» de la prison, un secteur réservé aux gens inculpés de crimes sexuels. «Il m'a raconté en détail ce qu'il a fait comme crime», a expliqué d'entrée de jeu M. Dubé au jury.

Après lui avoir tiré une balle dans la tête, Proulx a violé sa victime, a raconté le codétenu, toujours incarcéré. «C'était la première fois qu'il faisait l'amour avec une femme. Ben, qu'il baisait une femme», s'est-il repris. Il a eu droit à des commentaires disgracieux de Proulx sur l'odeur et le physique de la victime. «De toute façon, son temps était venu de mourir», aurait ajouté l'accusé à son compagnon de cellule à qui il s'est confié pendant «deux ou trois heures» au total. Proulx lui a aussi raconté plusieurs détails sur son passé. Il aurait entre autres été «marqué» par une fille dont il a été amoureux en 1995, mais qui a refusé ses avances.

Proulx n'avait pas révélé avoir eu une relation sexuelle complète avec sa victime lors de l'interrogatoire policier qu'il a subi, le jour de son arrestation, en mai dernier. Il avait toutefois avoué le meurtre à l'enquêteur.

En contre-interrogatoire, l'avocat de la défense Jean Desjardins a tenté de miner la crédibilité du témoin. Dubé, 49 ans, purge actuellement une peine d'un an de détention pour possession de pornographie juvénile et leurre informatique. La défense a aussi soulevé une erreur dans la chronologie du crime de Proulx telle que racontée par M. Dubé, sans toutefois remettre en question la véracité des confidences recueillies.

Le revolver du voisin

Autre révélation au procès, hier: Proulx a acheté illégalement l'arme du crime à son voisin, aussi locataire dans l'ancien presbytère de Rivière-Ouelle. Ce voisin d'étage, René Nadeau, lui a vendu un revolver de calibre 22 un mois avant le meurtre. «J'avais beaucoup d'hésitation à lui vendre l'arme», a-t-il témoigné la voix tremblante, les yeux humides. Lors de son arrestation, Proulx avait pourtant déclaré à un enquêteur de la Sûreté du Québec avoir acheté l'arme plusieurs années plus tôt, alors qu'il était encore aux études.

M. Nadeau, un ingénieur devenu professeur, a identifié le revolver devant le jury. «Oui, malheureusement (...) Ça me crève le coeur», a dit l'homme de 49 ans. Ensemble, ils ont même fait des exercices de tir à trois reprises dans un bois de Rivière-Ouelle. Une semaine avant le meurtre, ils sont allés tirer des boîtes de conserve.

En raison des «rumeurs fortes de vol» qui couraient à propos de Proulx, M. Nadeau a hésité avant de lui vendre l'arme. «Je savais que Francis Proulx ne travaillait pas et qu'il avait l'air d'avoir toujours de l'argent dans ses poches», a raconté l'homme qui s'est décrit comme un ancien militaire passionné d'armes à feu.

L'accusé lui a offert près du triple de ce que l'arme valait, soit 800$. Il lui a glissé la somme en billets de 20$ sous sa porte d'appartement. Il lui a aussi demandé de lui trouver un silencieux pour l'arme. Mais, M. Nadeau lui a plutôt proposé d'en fabriquer un de manière artisanale avec une bouteille de boisson gazeuse. Il a qualifié Proulx de «novice» en armes à feu qui «n'avait pas l'air dangereux».

Lorsque les policiers sont venus le voir après le drame, M. Nadeau a nié avoir vendu cette arme. «Émotionnellement, je n'étais pas capable de le dire», a-t-il expliqué. Le témoin a toutefois reçu à nouveau la visite des policiers le mois dernier. Ils ont saisi chez lui cinq carabines et quatre armes de poing non enregistrées au registre des armes à feu. Aucune accusation n'a encore été portée contre M. Nadeau. «J'ai cet arsenal-là plein de poussière depuis longtemps», a-t-il dit, contre-interrogé par la défense.

Le procès se poursuit aujourd'hui avec le témoignage de la pathologiste qui a analysé le corps de Nancy Michaud.