À en croire le délateur Stéphane Gagné, le commerce de drogue du motard Paul Fontaine roulait à fond dans le quartier gai, à Montréal, avant qu'ils décident tous deux de s'attaquer à des gardiens de la prison de Rivière-des-Prairies.

Devenu l'homme de confiance de Fontaine, Gagné avait pour tâche principale d'éloigner les importuns du territoire, tout en s'occupant de projets spéciaux. «J'étais payé pour tuer du monde, et ma paie venait des profits réalisés dans le quartier gai», a-t-il dit hier, lors de la quatrième journée de son contre-interrogatoire au procès devant jury de Paul Fontaine. Âgé de 40 ans, ce dernier est accusé du meurtre prémédité de l'agent Pierre Rondeau, le 8 septembre 1997.

Au besoin, Gagné remplaçait Fontaine à la tête de l'organisation. Il se chargeait alors de passer les commandes de cocaïne à un grossiste. Celui-ci acheminait ensuite la drogue dans une cache où un livreur s'en emparait pour la remettre à des petits revendeurs. Gagné a été appelé en renfort quand Fontaine s'est caché pendant quelques semaines parce qu'il se croyait recherché par la police dans une affaire d'importation de 300 kg de cocaïne.

«Je me rapportais quand même à lui. On se rencontrait dans des restaurants et je lui remettais de l'argent. Vous savez, ça coûte cher être sur la snike», a-t-il expliqué aux jurés. Maintenant familiers avec le jargon des motards, les 12 jurés ont compris que Gagné parlait de la cavale de Fontaine.

Après avoir longuement insisté auprès de Fontaine, Gagné soutient aussi avoir reçu le feu vert pour éliminer Christian Bellemare, un associé de longue date qui devait 10 000$ à Fontaine. Gagné lui en voulait également parce qu'il achetait de la drogue d'un concurrent. Un beau matin de mars 1997, feignant de l'emmener travailler dans une serre hydroponique, Gagné et un acolyte l'ont amené dans un bois de Sainte-Marguerite-du-Lac-Masson, où ils ont tenté de lui faire la peau. Battu et atteint de coups de feu, Bellemare a survécu à ses blessures.

Cet attentat raté a constitué la fin de la carrière de Gagné, qui a viré sa veste à la suite de son arrestation, le 5 décembre 1997. Principal témoin à charge, il a reconnu devant le tribunal avoir participé au meurtre du gardien Pierre Rondeau, en compagnie de Fontaine.

Le procès fait relâche aujourd'hui. Le contre-interrogatoire de Gagné se poursuit demain.