Azim Ibragimov a posé des actes terroristes en mettant le feu à deux établissements juifs, mais il l'a fait sans réelle conviction, parce qu'il avait des dettes et qu'il était sous le joug de son complice allégué, Omar Bulphred.

C'est ce qui se dégage des témoignages faits devant le juge Gilles Cadieux, hier, au palais de justice de Montréal. Le magistrat doit décider de la peine à imposer à Ibragimov.

L'homme de 25 ans a plaidé coupable à des accusations réduites d'incendie et de menaces contre la communauté juive. Le soir du 2 septembre, il a lancé un cocktail Molotov dans l'école Taldos Yakon Yosef, dans la rue Ducharme à Outremont.

Le soir du 3 avril 2007, le manège se répétait, cette fois avec des bonbonnes de propane, au centre communautaire juif Ben-Weider. Il y a eu peu de dégât à cet endroit. Entre les deux, il y a eu l'incendie d'une automobile, ainsi que des tracts revendiquant les attentats. Ibragimov est le scripteur de ces messages du «Jihad» appelant à la conversion à l'islam et la libération de prisonniers en Ontario, mais le penseur serait Bulphred. Ce dernier doit avoir son procès à partir du 14 octobre.

Infiltration

Hier, Sylvie Beauregard, enquêteuse à la section des incendies criminels du SPVM, a expliqué comment la police en était venue à soupçonner les accusés. En fait, Bulphred était déjà suspect, parce qu'un étrange incendie s'était produit chez lui, le 23 septembre 2006. Le feu avait pris dans un placard.

«On ne savait pas si c'était criminel ou accidentel», a expliqué la policière. L'enquête s'est poursuivie, et en décembre, un expert en graphologie, qui a examiné les tracts revendiquant les attentats, a pu établir le lien avec Ibragimov, un ami de Bulphred. De la filature, de l'écoute électronique et un agent d'infiltration ont été mis à contribution.

L'agent double s'est fait employer au même endroit qu'Ibragimov, dans un supermarché. Feignant d'être un militant contestataire, il a tissé des liens avec Ibragimov, qui s'est laissé aller à des confidences. Ce dernier a raconté que c'était «ses chums» qui avaient lancé le cocktail sur l'école juive. Ibragimov et Bulphred ont été arrêtés en avril 2007, peu de temps après l'attaque du centre Ben-Weider.

Selon la policière, toutes les choses incriminantes ont été retrouvées chez Bulphred, qui était déjà connu pour des activités à caractère raciste. Ibragimov a pour sa part collaboré avec les policiers. Adepte du Casino, et traînant des dettes, il aurait agi par appât du gain. Il n'aurait toutefois reçu que des objets et peut-être quelques dollars pour sa participation.

Hier, pour démontrer qu'Ibragimov n'a pas d'animosité envers les juifs, son ex-fiancée est venue témoigner. D'origine russe et de descendance juive, elle est sortie un an avec Ibragimov, entre juin 2005 et juin 2006. Elle dit qu'il est un musulman non pratiquant, et qu'il ne démontrait aucun mépris pour les juifs.

Par ailleurs, des représentants de la communauté juive sont venus témoigner de l'impact que les attentats ont eu sur leur communauté. Le procès se poursuit le 15 octobre prochain. C'est Me Gaétan Bourassa qui défend l'accusé, tandis que Me Mario Dufresne représente la Couronne.