Présentée par d'autres témoins comme étant le souffre-douleur de Bertrand Charest, Amy a raconté que l'accusé s'amusait à la rabaisser devant les autres, mais qu'il lui faisait des avances sexuelles lorsqu'ils étaient seuls.

Amy (nom fictif) est la douzième et dernière victime alléguée à témoigner au procès de Bertrand Charest. C'est elle qui est venue clore la preuve de la Couronne, vendredi. L'ex-skieuse de haut niveau, aujourd'hui dans la trentaine avancée, ne vit plus au Canada et a témoigné par le biais de la vidéoconférence. Elle a été entraînée par M. Charest pendant quatre ans dans les années 90, alors qu'elle skiait dans l'équipe laurentienne. Lors de la première année, c'était une relation normale d'entraîneur et jeune athlète, a-t-elle expliqué. Il y a eu une relâche d'un an, puis M. Charest est redevenu son entraîneur pour trois ans. Il la rabaissait devant les autres au sujet de son physique. Lui trouvait ça drôle, a-t-elle dit, mais ça ne l'était pas pour elle. Ça affectait sa confiance en elle, a-t-elle signalé.

Amy affirme que le harcèlement sexuel a commencé à se faire sentir au milieu des années 90. « Il me disait qu'il m'aimait, que j'avais quelque chose de spécial. Il me demandait de l'embrasser sur les lèvres, il me touchait souvent les seins. » Selon son témoignage, il l'a harcelée sexuellement tous les jours pendant la dernière année où il a été son coach. C'était lourd pour elle, d'autant plus qu'elle a demeuré pendant un certain temps au même endroit que M. Charest. Leurs chambres n'étaient pas loin l'une de l'autre. « À tous les jours il me disait : ma porte est grande ouverte, tu es la bienvenue », a-t-elle raconté, en signalant qu'elle, elle ne voulait pas.

« Je ne voulais pas coucher avec lui. Je ne voulais pas qu'il soit mon premier », a-t-elle dit. M. Charest la décourageait d'aller avec d'autres garçons, affirme-t-elle, et lui disait qu'il était le « meilleur candidat ».

Prêt d'argent

Amy avait la passion du ski, et de l'ambition. Mais le ski coûte cher, et à un certain moment, ses parents n'avaient plus les moyens de payer. Bertrand Charest leur a prêté de l'argent afin qu'elle continue. Selon elle, cela ajoutait à la relation de pouvoir qu'il avait sur elle. Un jour, il lui aurait fait un massage alors qu'il était par dessus elle. Elle raconte que les mains de M. Charest ont quitté son dos pour aller sur le devant de son corps, qu'il l'a retournée, et qu'ils se sont embrassés. Le téléphone a sonné, ce qui est venu interrompre ce moment. Heureusement, a fait valoir Amy, vendredi.

En contre-interrogatoire, Me Antonio Cabral, de la défense, a suggéré à Amy qu'elle participait activement à cet échange.

« Vous essayez de me faire dire que je consentais, mais non, je ne consentais pas. Je n'ai pas pensé que j'avais le choix de dire non », a répondu Amy.

Selon Amy, M. Charest avait une « importance démesurée » pour les athlètes. « Il voulait presque être un ami, plus qu'un entraîneur. À ce sujet, il agissait pareil avec les garçons [sans l'aspect sexuel]. »

Le procès se poursuit lundi. La défense a annoncé qu'elle aura des témoins à faire entendre, mais n'a pas dit combien, et de qui il s'agit.

M. Charest est jugé sous 57 accusations de nature sexuelle, dont 23 alors qu'il était en position d'autorité. Les faits reprochés se seraient produits entre 1991 et 1998, et concernent 12 jeunes filles, qui avaient entre 12 et 19 ans. M. Charest avait 26 ans, au début, et 33 à la fin. Selon les témoignages des 12 plaignantes, cinq d'entre elles auraient eu des relations complètes avec M. Charest, alors qu'elles étaient âgées entre 15 et 19 ans.