Le juge James L. Brunton a «erré en droit» en ordonnant des arrêts des procédures à l'endroit de l'influent Hells Angels Salvatore Cazzetta et de ses présumés complices, puisqu'il n'a pas tenu compte des longs délais imputables à la défense et de la «complexité particulière» de cette affaire de fraude de millions de dollars, plaide la Couronne dans son avis d'appel d'ordonnances d'arrêts des procédures déposé jeudi à la Cour d'appel du Québec.

La décision du juge de la Cour supérieure, le mois dernier, de libérer de toute accusation le Hells Angels Salvatore Cazzetta, avait créé une onde de choc dans le milieu judiciaire. La bâtonnière du Québec, Me Claudia P. Prémont avait d'ailleurs jugé «inacceptable» un tel dénouement. Dans le cadre de l'opération Machine, Cazzetta et trois membres de la famille Rice - Burton, Peter et Peter Francis - avaient été accusés de gangstérisme, de fraude et de complot de fraude alléguée de 67 millions à l'endroit des gouvernements de Québec et d'Ottawa.

Or, l'arrêt Jordan, une récente décision majeure de la Cour suprême, a instauré une durée maximale des procédures criminelles, menant ainsi à l'arrêt des procédures dans ce dossier. Néanmoins, la Couronne plaide que la défense est responsable de la plupart des délais, comme «celui de 25 mois associés à la tenue de l'enquête préliminaire avortée, le débat entourant la requête et celui de 9 mois associés à la revendication de droits ancestraux et issu de traité».

Dans sa demande de permission d'en appeler, la Couronne soutient que le juge Brunton a «omis de tenir compte des circonstances exceptionnelles concernant des événements distincts, soit l'absence pour cause de maladie de l'avocate de l'intimé Cazzetta, et concernant la complexité particulière de l'affaire [...] soit au départ 66 coaccusés, 40 témoins, 500 surveillances physiques, 100 000 conversations interceptées, 265 saisies».

Malgré l'arrêt des procédures dans l'affaire Machine, Salvatore Cazzetta n'a pas pour autant été libéré. Mercredi, dans une autre affaire, la Cour supérieure a refusé de le remettre en liberté provisoire pendant la durée des procédures. L'influent Hells Angels est accusé de gangstérisme et de recel dans le cadre de l'enquête Magot-Mastiff qui a décapité le crime organisé montréalais en novembre dernier.

- Avec Daniel Renaud, La Presse