Robert Byer, ce résident de Notre-Dame-de-l'Île-Perrot qui a évité de payer ses loyers depuis près de 20 ans en multipliant les recours à la Régie du logement, s'est fait interdire de déposer toute nouvelle poursuite en Cour du Québec sans l'autorisation du juge en chef.

La juge Céline Gervais, de la Cour du Québec, a déclaré M. Byer et sa conjointe Cristina Carrier « plaideurs quérulents » dans un jugement de 18 pages rendu cette semaine. Ce statut leur interdit tout recours devant le tribunal, sauf si le juge en chef en personne considère qu'il est fondé. La Cour supérieure avait déjà déclaré M. Byer plaideur quérulent en 2014, mais le processus devait être refait pour être valable devant le tribunal de la Cour du Québec.

« J'espère qu'il aura eu sa leçon », a réagi l'avocat Serge Laflamme, qui a affronté M. Byer plusieurs fois devant les tribunaux pour trois clients différents qui ont été victimes de non-paiement de loyer.

Dans son jugement, la juge Céline Gervais relève 10 cas depuis 1995 où M. Byer et sa conjointe ont multiplié les recours - faisant parfois des dizaines de requêtes par dossier - pour éviter de payer leur loyer. M. Byer s'est même rendu jusqu'à la porte de la Cour suprême pour réclamer, en vain, l'annulation d'un de ces jugements.

« Il est facile de constater que M. Byer utilise tout l'arsenal des procédures existantes » afin de « retarder indûment le prononcé d'une décision ou son exécution », écrit la juge Céline Gervais.

En date d'hier, M. Byer n'avait toujours pas quitté le logement qu'il loue à Nassib Khoury, un ingénieur qui lui a loué sa maison à l'été 2014 alors qu'il partait rejoindre sa mère à l'étranger. La Régie du logement avait pourtant exigé son expulsion à la fin du mois de janvier, mais M. Byer l'a contestée, ce que lui a refusé la juge Céline Gervais dans son jugement.

RÉGIE DU LOGEMENT IMPUISSANTE

Malgré son inscription au registre des plaideurs quérulents, Robert Byer pourra en théorie continuer d'intenter des recours et poursuites à la Régie du logement, puisque ce tribunal administratif n'a pas le pouvoir de déclarer un individu quérulent.

Selon Hans Brouillette, porte-parole de la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec, le feuilleton de M. Byer démontre à quel point « le système peut facilement être embourbé ». L'organisme réclame des changements législatifs pour forcer les locataires qui contestent une décision de la Régie du logement à déposer leur loyer en garantie au greffe du tribunal jusqu'à ce qu'une décision soit rendue sur le fond. 

Le ministre des Affaires municipales, Martin Coiteux, a d'ailleurs déclaré en commission parlementaire mardi qu'il n'est « pas improbable » qu'il modifie la loi en ce sens, « mais il faudra tenir compte de l'équilibre entre le droit des propriétaires et des locataires. C'est le fondement même de la raison pourquoi on a créé la Régie du logement ».