L'ex-mairesse de Boisbriand Sylvie Saint-Jean admet qu'elle faisait affaire avec les firmes de génie-conseil Roche, BPR-Triax et Groupe Séguin parce qu'elles participaient à son financement politique et aux causes caritatives de la municipalité.

«Ces firmes étaient là depuis 1998. Elles étaient toujours présentes dans nos soirées de financement, pour faire des dons au parti», a-t-elle déclaré hier dans le cadre du procès pour fraude et partage des contrats municipaux à Boisbriand. «Je ne connaissais pas d'autres firmes... Roche, BPR, c'est eux autres qui tournaient autour de nous...» a-t-elle ajouté.

Mme Saint-Jean, qui a plaidé coupable dans cette affaire en février 2014, est aujourd'hui témoin dans ce premier grand procès qui découle d'une enquête de l'Unité permanente anticorruption (UPAC). Au banc des accusés: l'ancienne vice-présidente de la firme de génie-conseil Roche France Michaud et le prédécesseur de Mme Saint-Jean à la mairie, Robert Poirier. Ils sont accusés de complot, de fraude et d'abus de confiance.

Continuité

Sylvie Saint-Jean, 55 ans, a été mairesse de Boisbriand de juillet 2005 à novembre 2009. Elle a été conseillère municipale de 1998 à 2005 dans l'équipe du maire Poirier. Elle a pris la place de M. Poirier lors de sa démission, en juillet 2005.

Sous le règne du maire Poirier, Roche, BPR-Triax et Séguin avaient été choisies après que la Ville eut dû procéder à un appel d'offres par invitation pour les contrats de 25 000 à 100 000$, a témoigné l'ex-mairesse Saint-Jean.

Les trois firmes sont restées les mêmes lorsque Mme Saint-Jean a pris l'intérim à la mairie, de juillet 2005 à novembre 2005. Après les élections de 2005, les choses se sont corsées. Sylvie Saint-Jean a été réélue, mais les conseillers de son parti étaient minoritaires.

Trois nouvelles firmes

En mai 2006, le clan de la mairesse actuelle, Marlene Cordato, a fait passer une résolution pour que trois nouvelles firmes de génie-conseil soient invitées à soumissionner les contrats de 25 000 à 100 000$: Projeco associés, Dessau-Soprin et Génivar.

«J'ai dit à Mme Cordato que j'étais prête à garder Génivar et Dunton-Rainville [une firme d'avocats] pour qu'on essaye de travailler ensemble», a témoigné Mme Saint-Jean. 

En novembre 2006, le conseil municipal a désigné les firmes Génivar et BPR-Triax comme celles qui seront invitées à soumissionner par la Ville les contrats de génie-conseil de 25 000 à 100 000$. 

«Et pourquoi pas la firme Roche?», a demandé la procureure de la Couronne Nicole Martineau. «Parce que Roche avait déjà obtenu le contrat de l'usine d'épuration d'eau», a répondu Mme Saint-Jean.

Roche a remporté le contrat d'élaboration des plans et devis pour la réfection de l'usine d'épuration de Boisbriand. La firme a évalué le coût des travaux à 23 millions. Un seul entrepreneur a cependant soumissionné le contrat de construction. La firme Infrabec, qui appartient à Lino Zambito, a effectué une soumission 28,7 millions.

Au final, la Ville de Boisbriand a accepté de donner 1,1 million de plus que prévu à la firme Roche en majoration d'honoraires pour la préparation des plans et devis ainsi que pour la surveillance du chantier et la rédaction d'un manuel d'opération. 

Les procureurs de la Ville avaient pourtant produit un avis juridique voulant que les honoraires de Roche ne pouvaient pas être ajustés en fonction de la soumission de 28,7 millions. 

Le directeur du service du génie de la Ville, André Lapointe, a témoigné lundi que le tarif demandé par Roche sur la base du projet de 28,7 millions était de toute manière en deçà du barème de l'Association des ingénieurs-conseils lorsque le calcul des honoraires était appliqué sur la base d'un projet de 23 millions. 

Le conseil municipal a donc voté pour que Roche obtienne les honoraires demandés.