La famille de Ronald Malo, sauvagement assassiné par son voisin après des années de harcèlement, vient d'intenter une poursuite contre l'auteur du crime, Rolland Belzil.

L'homme de 73 ans n'a pas subi de procès. Il a été déclaré non criminellement responsable de ses actes en janvier 2013, un an après le drame.

La poursuite en dommages de 760 000 $ vise aussi Lyse Legault, l'épouse de M. Belzil. On lui reproche d'avoir permis et même encouragé les agissements de son mari, qui était persuadé que M. Malo leur avait vendu un terrain contaminé. 

Le 13 janvier 2012, M. Malo, 80 ans, s'apprêtait à sortir son tracteur de la grange pour déneiger l'entrée. M. Belzil a surgi et l'a tué de 29 coups de couteau. M. Belzil, un ancien ingénieur, s'est ensuite rendu au domicile de sa victime dans le but de tuer son épouse, Nicole Malo. Heureusement pour elle, la porte était verrouillée et elle n'a pas répondu à ses coups de sonnette. 

M. Belzil a poursuivi son chemin jusqu'à l'hôtel de ville de Verchères, où il a demandé à voir le directeur général de la Ville, Luc Forcier, ainsi que l'urbaniste, Martin Massicotte. Il a attendu calmement une vingtaine de minutes dans la salle d'attente. Quand il a été introduit auprès des deux employés, M.Belzil a utilisé une ruse pour détourner leur attention et les a attaqués à coups de couteau. Les deux hommes ont été blessés à la tête et au cou avant qu'un pompier réussisse à maîtriser l'assaillant. M. Belzil a fait valoir qu'il avait réglé le cas de M. Malo.

En cours d'enquête, les policiers allaient découvrir des documents émanant de M. Belzil et portant le code K4J (Kill for justice) indiquant qu'il avait planifié de tuer M. Malo, son épouse, de même que les deux employés de la Ville. Il croyait que les Malo avaient orchestré un complot contre lui avec une douzaine de personnes. Des avocats étaient aussi sur cette liste.

M. Belzil a été soumis à des évaluations après son arrestation. Il a été jugé apte à subir son procès. Plus tard, un psychiatre a conclu que l'accusé n'était pas en mesure de juger de ce qu'il faisait au moment des crimes. L'homme souffrait d'un trouble délirant persécutoire, possiblement aussi d'une démence et d'un problème d'alcool. Un an après les crimes, sans procès ni enquête préliminaire, M. Belzil a été déclaré non criminellement responsable en Cour du Québec.

Sorties accordées

L'homme est toujours détenu à l'Institut Philppe-Pinel, mais en juin dernier, la Commission d'examen des troubles mentaux a donné son aval pour des sorties, notamment pour assister à des rencontres des Alcooliques anonymes. Il peut aussi sortir pour un maximum de 12 heures, avec son frère ou son épouse, qui aurait obtenu le divorce depuis, après 48 ans de mariage.

Ces sorties terrorisent la famille de feu Ronald Malo, qui craint que M. Belzil ne vienne terminer ce qu'il avait commencé. Avant le drame, l'homme s'était souvent retrouvé devant la justice pour le harcèlement qu'il faisait subir à ses voisins et il finissait toujours par ne pas respecter ses engagements et par recommencer.

Me Christine Duchaine est convaincue que M. Belzil savait ce qu'il faisait, et elle comprend la crainte des Malo. 

« À Pinel, M. Belzil disait avoir manqué son coup parce qu'il en avait eu juste un. »

M. Belzil soutient qu'il a changé, qu'avant il ne réalisait pas qu'il devait respecter ses conditions. Il abusait de l'alcool et y ajoutait des médicaments.

Quoi qu'il en soit, le drame a changé la vie de Nicole Malo, qui est devenue veuve et qui craint pour sa sécurité. Ses deux enfants, Isabelle et Sylvain, ont également été très affectés. Ils réclament des dommages moraux et punitifs pour la souffrance vécue.

EXTRAITS DE LA POURSUITE 

« M. Belzil a continuellement, durant plus de quinze ans, harcelé, intimidé et menacé la famille Malo. Il a eu recours aux insultes, à la violence, aux menaces et aux procédures judiciaires, et ce, malgré les interventions nombreuses des forces judiciaires. »

« Dès 1997, M. Belzil s'est mis en tête d'anéantir la qualité de vie des Malo... afin de les ruiner financièrement et de les pousser à vendre leur terrain pour qu'il puisse en prendre possession. »

UN COIN DE PARADIS TRANSFORMÉ EN ENFER

M. Malo a connu M. Belzil et son épouse en 1992, quand il leur a vendu un terrain en bordure du fleuve, à Verchères. Il s'agissait de la terre sur laquelle M. Malo avait été élevé et dont il avait hérité. Il avait gardé le lopin de terre adjacent et s'y rendait pour jardiner et passer du temps avec ses proches. C'était son coin de paradis. M. Belzil l'a transformé en enfer.