Pendant que Giuseppe De Vito était en cavale, son épouse Adèle Sorella sombrait dans la dépression et accumulait les tentatives de suicide. Leurs filles, Amanda, 8 ans, et Sabrina, 9 ans, s'ennuyaient de leur père. Les adultes leur disaient que leur papa était retenu au loin en raison de son travail.

C'est ce qui se dégage du témoignage que Teresa Di Cesare a livré, lundi, au procès de sa fille, Adèle, qui se tient à Laval. Adèle Sorella, 47 ans, est  accusée d'avoir tué avec préméditation ses deux filles, le 31 mars 2009. Au moment du drame, cela faisait deux ans et demi que son mari était en fuite. Mme Di Cesare s'était installée chez sa fille, vu l'absence de son gendre. 

«Adèle n'allait pas bien, a-t-elle dit. Je ne pouvais pas laisser ma fille toute seule avec les enfants sans mari». De fait, Adèle Sorella aurait essayé de s'enlever la vie à trois reprises pendant la cavale de son mari. Selon Mme Di Cesare, la première tentative de suicide est survenue en novembre 2006, deux jours après que la police se fut présentée à leur luxueuse résidence de Laval pour arrêter M. De  Vito dans le cadre de l'opération antimafia Colisée. Adèle Sorella a pris des médicaments pour se tuer. En sortant de l'hôpital, elle est allée vivre avec ses parents, tandis que les enfants vivaient chez les parents de Giuseppe De Vito.

En janvier 2007, Adèle avait réintégré sa grande maison de la rue de l'Adjudant avec les enfants, et sa mère est allée vivre avec elle. Elle se souvient qu'Adèle a fait une autre tentative de suicide avec des médicaments, mais elle n'a pas déterminé le moment. «J'entendais de l'eau couler. Je la croyais dans la baignoire. Je suis montée, et la porte était ouverte. Elle avait les médicaments dans les mains.»

Mme Di Cesare pense que sa fille avait peur de quelque chose, ou de quelqu'un, mais elle n'en parlait pas. Adèle espérait le retour de son mari. «Elle disait: un jour il  va revenir.»

Matin du drame

Le matin du drame, Mme Di Cesare a quitté la maison vers neuf heures pour aller chez sa soeur. Sabrina et Amanda avaient leur uniforme scolaire et étaient encore à la maison à ce moment.  À onze heures, Adèle devait aller chercher sa mère chez sa soeur, pour l'amener à un rendez-vous médical. Mais Adèle n'est pas venue. Mme Di Cesare l'a appelée, et a laissé un message. Adèle a rappelé, une heure plus tard, et a dit qu'elle avait manqué le rendez-vous. Dans une déclaration faite à la police le soir du drame, Mme Di Cesare avait raconté que sa fille lui avait dit aussi: «Ça a pris plus de temps que prévu avec les enfants.»

Aujourd'hui, Mme Di Cesare réfute ses propos et dit qu Adèle ne lui a pas parlé des enfants. Elle soutient que son cerveau ne fonctionne plus très bien depuis les événements, et que parfois, elle oublie même son nom. Son interrogatoire se poursuit mardi.

Un peu plus tôt, lundi, Enzo Sorella, frère de l'accusée, a raconté comment lui et son frère Luigi avaient découvert leurs nièces sans vie, vers 16h30, le 31 mars 2009. Ils s'étaient rendus chez Adèle car celle-ci avait laissé un message inquiétant à Luigi. En entrant dans la maison, Adèle n'était pas là, mais leurs petites étaient allongées côte à côte par terre, dans la salle de jeu.  De l'écume sortait de leur bouche et de leur nez, la couleur de leur peau avait changé et elles étaient froides, a expliqué Enzo Sorella. Luigi a appelé le 9-1-1. «Vite une ambulance» répétait-il. Sur les conseils du préposé du 9-1-1, les deux frères ont tenté de réanimer les filles, mais il n'y avait rien à faire.

Encore aujourd'hui, le ministère public ne peut préciser de quoi sont mortes Amanda et Sabrina. Il y avait une chambre hyperbare dans la maison, mais pour l'instant on ignore si l'appareil a joué un rôle dans leur décès.