Au total, 68 écoles des quatre coins du Québec, de même que plusieurs écoles ontariennes, ont été visées mardi par des alertes à la bombe, ce qui a entraîné des évacuations à l'extérieur de Montréal et des fouilles un peu partout dans la province. En soirée, la Sûreté du Québec a laissé savoir que toutes ces écoles avaient fait l'objet de fouilles et qu'aucune bombe n'a été trouvée.

«En ce qui concerne la réouverture des établissements qui ont été fermés, la décision sera prise par les autorités du ministère de la Sécurité publique, conjointement avec celles du ministère de l'Éducation [...]», a précisé la SQ par voie de communiqué.

C'est pendant la nuit de lundi à mardi que le courriel de menaces a été envoyé. Pierre Moreau, ministre de la Sécurité publique en remplacement de Lise Thériault, qui est en arrêt de travail, a confirmé que les auteurs s'identifiaient comme membres du groupe «Sceptre rouge», un groupe inconnu des policiers.

Dans le courriel, le ou les auteurs annoncent «une campagne de quatre jours de mort à tout [sic] les Canadiens». Se disant «furieux avec les syndicats de professeurs et les horreurs qu'ils infligent sur les enfants innocents», ils soutiennent avoir posé une bombe dans une école secondaire, une bombe dans une école primaire et deux bombes dans «des autobus scolaires ou de la ville, utilisés par ces étudiants».

Sceptre rouge et enquête

Le Sceptre rouge, le collectif dont le nom apparaît sur les courriels envoyés dans les écoles, n'est pas connu des services policiers. Après avoir d'abord géré et éliminé la menace en fouillant les établissements et en assurant la protection des étudiants et des enseignants, les corps de police ont commencé à rassembler les premiers éléments de l'enquête visant à retrouver le ou les auteurs de ce méfait. Comme dans le cas d'une menace terroriste, tous les corps de police doivent acheminer les informations qu'ils recueillent à la Sûreté du Québec, qui dirige l'enquête.

«On va commencer par voir ce qu'on peut extraire des courriels. Il est trop tôt pour déterminer combien de personnes se trouvaient derrière le ou les claviers qui ont servi à envoyer ces courriels. C'est une enquête complexe et longue qui s'amorce contre des individus qui ont habituellement des connaissances en informatique», a confié à La Presse une source qui n'excluait pas que les auteurs puissent être des élèves en colère contre les enseignants.

L'enquête se poursuit

Les policiers du Québec et de l'Ontario continuent d'enquêter. Des écoles de la région d'Ottawa ont aussi fait l'objet de menaces la semaine dernière et mardi, tout comme des écoles de Toronto.

Cette menace proférée contre les écoles est un geste «inacceptable», «criminel» et «lâche», a dit le premier ministre Philippe Couillard.

Les personnes responsables «doivent savoir qu'elles seront poursuivies et que l'enquête sera rigoureuse», a-t-il ajouté.

Il a été question, pendant la journée, que Québec dresse la liste des écoles visées, mais le gouvernement s'est ravisé et a décidé de n'en rien faire avant la conclusion de l'enquête policière.

À Montréal, on a dû procéder à des fouilles dans diverses écoles de la commission scolaire Marguerite-Bourgeoys.

Jean-Pierre Brabant, porte-parole du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), a précisé que des écoles de Saint-Laurent, Beaconsfield, Dorval et Rivière-des-Prairies avaient reçu le courriel.

Dans un communiqué commun, les syndiqués regroupés dans le front commun ont appelé le personnel en moyen de pression «à suivre tous les mots d'ordre qui émaneront des corps policiers afin d'assurer le plus haut niveau de sécurité aux élèves, aux étudiants, ainsi qu'à tout le personnel des commissions scolaires et des cégeps».

«Nous condamnons le geste du collectif qui a diffusé ce message haineux. Nous déplorons que les syndicats et le syndicalisme en général soient menacés directement dans le texte diffusé par les auteurs de ces appels à la bombe. On ne fera aucune déclaration dans l'immédiat sur le contenu de ce texte, mais il faudra bien entendu se pencher rapidement sur les raisons de cette violence contre les associations de travailleurs et travailleuses qui agissent en toute légalité et dans le respect du Code du travail», ont écrit les porte-parole du Front commun, Daniel Boyer (FTQ), Jacques Létourneau (CSN) et Louise Chabot (Secrétariat intersyndical des services publics).

Des cégeps perturbés

Six cégeps à l'extérieur de Montréal - à Drummondville, en Outaouais, à Lévis-Lauzon, L'Assomption, Saint-Hyacinthe et Sept-Îles - ont préféré fermer leurs portes pendant au moins une partie de la journée, tout comme d'autres écoles primaires ou secondaires ailleurs au Québec.

«Pour nous, c'était la troisième fois en quelques jours que nous évacuions, a expliqué Michael Randall, directeur général du cégep Héritage, à Gatineau. Nous en sommes à notre troisième courriel de menaces nous visant directement ou de façon générale, parmi d'autres établissements.»

Ces derniers temps, entre les grèves, les moyens de pression et les coupes, les écoles ont peu de répit, a-t-il poursuivi. «Nous n'avions pas besoin de cela en plus.»

Au Cégep de Drummondville, on a fait preuve de la même prudence et on a aussi procédé à une évacuation. «Demain [mercredi], nous aurons plus d'agents de sécurité qu'à l'habitude», a précisé Brigitte Bourdages, directrice générale du cégep.

Au total, 21 des 48 cégeps du Québec ont reçu le courriel.

Pour l'heure, il n'y a aucune preuve que la menace était fondée. Mais le ministre Pierre Moreau assure que les autorités traitent l'affaire avec sérieux.

«Les parents inquiets de la sécurité de leurs enfants doivent savoir que dans chaque établissement, il y a des plans d'évacuation dans des situations semblables», a-t-il indiqué.

De son côté, la Sûreté du Québec a activé son Centre de contrôle pour coordonner à la grandeur du Québec les opérations policières portant sur cette menace. Le corps policier travaille simultanément à l'application des mesures d'urgence sur le terrain et à l'enquête pour déterminer l'origine de la lettre.

- Avec la collaboration de Vincent Larouche et Daniel Renaud