Un criminel notoire au parcours tumultueux, ancien associé du parrain de la mafia Vito Rizzuto, se bat pour obtenir sa libération conditionnelle, dans le but, assure-t-il, de mener une vie rangée et honnête.

D'emblée, le nom de Christian Deschenes ne dit peut-être rien aux lecteurs, mais il a été l'un des acteurs majeurs de la plus importante tentative d'importation de cocaïne par voie aérienne de l'histoire du Canada. C'est en effet lui et ses hommes qui, le matin du 18 novembre 1992, ont quitté trop tôt la piste de Casey, laissant en plan le pilote de brousse Raymond Boulanger et les 4000 kg de cocaïne qu'il transportait.

Au fil des ans, Deschenes a gravi les échelons du crime organisé, si bien qu'on le retrouvait à la droite de Vito Rizzuto.

À la fin des années 80, il a été arrêté pour importation de 14 tonnes de haschisch. C'est lui qui était responsable du transport. «Si un camion ne s'était pas renversé, je n'aurais jamais été pris», analyse-t-il.

En juillet 2001, il a été de nouveau appréhendé pour avoir comploté l'enlèvement de lieutenants de la mafia et le meurtre de Vito Rizzuto, après que l'un de ses complices eut éventé le projet et fut devenu un agent source de la police. Les enquêteurs ont saisi un véritable arsenal dans cette sordide affaire.

Tourner la page

Tous ces crimes commis alors qu'il était en libération conditionnelle font que Deschenes purge une peine accumulée de 45 ans de pénitencier. Aujourd'hui, il en a assez, dit-il, et jure qu'il n'a plus de liens avec le crime organisé et qu'il veut tourner la page.

Témoignant dans un français châtié, avec une apparente transparence et beaucoup d'aplomb, Deschenes a expliqué que peu après sa libération conditionnelle du début des années 2000, l'un de ses grands amis, qu'il considérait comme un membre «de sa famille élargie», et le père de ce dernier ont été victimes d'attentats. C'est, dit-il, pour cette raison, et parce qu'on lui devait une somme importante, qu'il a fomenté le complot d'enlèvement et de meurtre.

«À ce moment, il y avait beaucoup de fluctuations dans le crime organisé et c'était mes allégeances. Je connais leurs us et coutumes, je suis allé au salon funéraire et j'ai compris. Pour moi, il n'y avait pas d'autre solution. Appeler la police n'aurait fait qu'aggraver les choses. J'ai fait le mauvais choix», dit-il.

À l'époque, la police affirmait que Deschenes avait l'intention de tuer Vito Rizzuto. Pourtant, il ne semblait pas nourrir de griefs contre le défunt parrain, hier, devant les commissaires aux libérations conditionnelles.

Deschenes dit avoir abandonné l'idée de réclamer sa dette à sa libération et semble avoir réglé son conflit avec ses anciens ennemis, puisqu'ils sont tous détenus dans le même pénitencier.

Désir de poursuivre des études

Devant les commissaires, il s'est par ailleurs prononcé contre la légalisation de la marijuana et a décrit la cocaïne comme un fléau.

Deschenes veut compléter des DEP en soudure et en montage architectural et structural en acier. Il désire aller dans une maison de transition, car ce programme est impossible à suivre dans un pénitencier à sécurité minimum, une incongruité, selon le détenu, qui ne s'est pas gêné pour en relever quelques autres. Il demande également qu'on lui accorde une semi-liberté ou qu'on lui permette des sorties sans escorte.