L'Assemblée nationale a renoncé, jeudi, aux services juridiques d'une avocate soupçonnée d'être utilisée comme briseuse de grève.

L'institution a annoncé en fin de journée que cette employée occasionnelle était désormais affectée à d'autres tâches que la pratique du droit, a indiqué la porte-parole, Noémie Cimon-Mattar, dans un courriel.

Mme Cimon-Mattar a affirmé que cette décision avait été prise jeudi et qu'elle était «effective immédiatement».

«L'Assemblée a affecté l'employée à d'autres fonctions de sorte de celle-ci ne pourra travailler à titre d'avocate ainsi que sur tout dossier de nature juridique, et ce, tant que le conflit de travail ne sera pas réglé», a-t-elle écrit.

Dans son courriel, Mme Cimon-Mattar a expliqué que l'Assemblée nationale souhaitait, avec sa décision, éviter de mettre de l'huile sur le feu.

«L'Assemblée, dans le contexte actuel de moyens de pression, souhaite éviter que ses décisions puissent être interprétées comme une manière de contourner le droit de grève, ce qu'elle n'a jamais eu l'intention de faire», a-t-elle écrit.

Un porte-parole de regroupement syndical Les avocats et notaires de l'État québécois (LANEQ), François Desroches-Lapointe, a jugé que ce retrait démontre la faute de l'Assemblée nationale.

«C'est un aveu, ni plus ni moins, que cette personne était engagée pour faire des tâches qui sont normalement nos tâches, a-t-il dit en entrevue téléphonique. C'est un travail de briseur de grève qui était fait par cette personne.»

Jeudi matin, LANEQ, qui représente les juristes en grève depuis 13 semaines, avait réclamé une enquête pour déterminer si des briseurs de grève avaient été embauchés par l'Assemblée nationale et le ministère de la Justice.

Selon le regroupement, un stagiaire a également accompli les tâches de ses membres au ministère de la Justice pour la mise en place de la commission d'enquête sur la protection de la confidentialité des sources journalistiques et de la commission d'enquête sur les relations entre les autochtones et certains services publics.

La ministre du Travail, Dominique Vien, a affirmé que la demande de LANEQ était actuellement analysée pour déterminer si une enquête est réellement nécessaire.

«J'ai été informée effectivement, comme vous, que les juristes de l'État se plaignent d'embauche de "scabs", a-t-elle dit en conférence de presse. Alors, c'est quelque chose qui va être analysé chez nous.»

Le député péquiste Sylvain Gaudreault a déclaré jeudi que son groupe parlementaire a refusé d'accorder des délais supplémentaires au gouvernement qui est incapable de présenter des amendements à un projet de loi actuellement à l'étude.

Selon M. Gaudreault, le ministre de l'Environnement David Heurtel, qui travaille avec M. Gaudreault sur le projet de loi 102, est dans cette situation en raison du conflit avec les avocats chargés de rédiger ces textes.

«Ce n'est pas vrai qu'on va embarquer dans ce jeu-là, parce que ça, ça serait devenir indirectement des «scabs', et ça, là-dessus, le Parti québécois refuse à tout prix de faire ça», a-t-il dit en point de presse.

Jeudi, les représentants de LANEQ ont eu une première rencontre le président du Conseil du trésor, Pierre Moreau, depuis sa nomination au début de cette semaine.

«Nous avons pu présenter notre position directement au ministre, a dit dans un communiqué le président Jean Denis. Cela n'était toutefois pas une rencontre de négociation.»

Les 1100 avocats et notaires de la fonction publique québécoise et de l'Agence du revenu du Québec sont en grève générale illimitée depuis le 24 octobre dernier.

Leurs revendications portent principalement sur la réforme de leur mode de négociation, sur la base de leur rôle particulier et de leur indépendance de fonction.