La Défense accueille très mal les conclusions du rapport Lortie sur le cafouillage du mégaprocès SharQc rendu public tard en fin de journée, mardi.

«C'est un rapport, disons, étonnant. On accuse la Défense d'être responsable d'une partie des problèmes alors que la Couronne a le fardeau de la preuve. Elle ne peut non plus se cacher derrière la montagne de preuve pour dire que ce n'était pas gérable», affirme Me Danièle Roy, présidente de l'Association des avocats de la Défense.

Le rapport de 60 pages, aboutissement d'une enquête administrative menée par Me Jean Lortie à la demande de la Directrice des poursuites criminelles et pénales Me Annick Murphy pour faire la lumière sur la fin en queue de poisson du mégaprocès SharQc, conclut notamment que la Couronne n'a en aucun temps caché des éléments de preuve à la Défense, et que des réponses données, des réactions adoptées ou des décisions prises autant par les policiers, les procureurs de la Couronne ou les avocats de la Défense auraient pu conduire à une divulgation plus rapide.

Rappelons qu'en octobre 2015, le juge James L. Brunton de la Cour Supérieure a décrété un arrêt des procédures contre cinq membres des Hells Angels de Sherbrooke, car la Couronne a mis quatre ans avant de divulguer à la Défense la preuve entourant deux enquêtes policières menées en Ontario, les projets Snack et Cadbury.

Me Roy et son collègue, Me Daniel Rock, défendent tous les deux le juge Brunton, «un magistrat qui a tout fait pour sauver la cause, qui aurait pu tout arrêter lors de la libération de 31 accusés en mai 2011 et qui leur a sauvé les fesses [à la Couronne] à plusieurs reprises», affirme Me Rock.

«Le juge Brunton est extrêmement rigoureux. C'est un peu particulier que le rapport conclut qu'il s'est trompé», renchérit Me Roy.

Selon Me Rock, il est faux de conclure que la Couronne n'a jamais tenté de cacher de la preuve. Il cite en exemple, tableau à l'appui, que la Poursuite aurait caché le fait que le délateur Sylvain Boulanger a rencontré un autre policier avant l'enquêteur Dubé en 2006, que la Défense a demandé cette preuve, que l'existence de cette rencontre a d'abord été niée avant d'être finalement divulguée en mai 2014.

«Le rapport fait des reproches à la Défense, mais ce n'est pas vrai. Quand on pose des questions, on doit avoir les réponses», dit Me Daniel Rock.

«Le rapport dit qu'il aurait fallu que la Défense s'adresse à la police provinciale de l'Ontario pour obtenir la preuve de Cadbury. Ce n'est pas à la Défense de faire la preuve que la Couronne a menti. La Couronne a l'obligation de divulguer la preuve. Avec le rapport Bouchard rendu en octobre, la Couronne devra maintenant dévoiler toute sa preuve dès le dépôt des accusations, ce seront les nouvelles normes», conclut Me Roy.