La saga judiciaire opposant le «carré rouge» Gabriel Nadeau-Dubois au «carré vert» Jean-François Morasse est sur le point de prendre fin.

En rendant sa décision, jeudi matin, la Cour suprême du Canada mettra un point final à cette histoire qui remonte à un peu plus de quatre ans.

«Je suis fébrile. J'ai hâte, évidemment, d'avoir le résultat d'une longue aventure de quatre ans qui va prendre fin demain», a dit en entrevue téléphonique Gabriel Nadeau-Dubois.

«J'espère avoir gain de cause; je crois que je vais avoir gain de cause. Mais j'ai aussi hâte que cette histoire-là soit derrière moi», a ajouté l'ancien leader étudiant.

Il évalue que la facture associée à cette longue lutte devant les tribunaux oscille entre 100 000 $ et 150 000 $. Une bonne partie de la note a été épongée par les quelque 103 000 $ amassés grâce à une campagne de sociofinancement, a expliqué M. Nadeau-Dubois.

Il a réitéré qu'il n'avait pas livré bataille pour laver sa réputation et encore moins pour échapper aux 120 heures de travaux communautaires dont il a écopé, mais bien pour défendre ses valeurs fondamentales.

«Ce qui est en jeu, c'est la liberté d'expression, c'est la capacité pour les porte-parole de mouvements citoyens d'exprimer leur opinion, d'exprimer même leur désaccord avec une décision rendue par les tribunaux», a plaidé M. Nadeau-Dubois.

«Alors c'est sûr que si je perds demain, je vais être extrêmement déçu», a-t-il lâché à l'autre bout du fil depuis Mont-Laurier, sur le chemin du retour d'une consultation publique de l'initiative «Faut qu'on se parle», qui se tenait mercredi soir à Rouyn.

L'ancien porte-parole de la Coalition large de l'Association pour une solidarité syndicale étudiante (CLASSE) a été reconnu coupable en novembre 2012 d'outrage au tribunal pour des propos tenus en entrevue au Réseau de l'information (RDI) pendant la grève étudiante.

Dans cet entretien diffusé alors que les étudiants se tournaient de plus en plus vers les tribunaux pour avoir accès à leurs cours, M. Nadeau-Dubois a lancé un appel à la désobéissance, a estimé M. Morasse, qui a donc déposé une requête en Cour supérieure.

L'étudiant de l'Université Laval, qui avait obtenu une injonction interlocutoire pour assister à ses cours environ un mois avant la diffusion de l'entrevue, a eu gain de cause devant le tribunal de première instance, mais il a ensuite été débouté en Cour d'appel en janvier 2015.

Il a décidé de porter sa cause jusqu'en Cour suprême du Canada. Les neuf juges du plus haut tribunal au pays ont entendu les arguments des deux camps en avril dernier.

Cette audience avait donné lieu à une véritable dissection des commentaires formulés par Gabriel Nadeau-Dubois pendant la fameuse entrevue diffusée sur les ondes de l'émission «24/60».

Selon la transcription de l'entretien, l'ancien porte-parole de la CLASSE a affirmé qu'il trouvait «tout à fait légitime que les gens prennent les moyens nécessaires pour faire respecter le vote de grève» des étudiants et que les piquets de grève étaient tout aussi légitimes pour y arriver.

Là où l'avocat de M. Morasse a dit voir «une preuve directe» d'une intention d'inciter les grévistes à ignorer les injonctions, celui de M. Nadeau-Dubois a plaidé que son client a exercé sa liberté d'expression et qu'il n'était pas au courant de l'injonction qui avait été accordée à M. Morasse.

L'avocat de Jean-François Morasse, Maxime Roy, n'a pas souhaité accorder d'entrevue à la veille de la décision de la Cour suprême du Canada.