Un corps policier municipal en Ontario réévalue sa directive qui prévoit que les femmes en cellule au poste doivent retirer leur soutien-gorge pour des raisons de sécurité.

La semaine dernière, une juge a rejeté l'accusation de conduite avec les facultés affaiblies qui pesait contre une dame, parce que les policiers de Chatham-Kent l'avaient forcée à retirer son soutien-gorge lors de sa détention provisoire.

Le chef de la police, Gary Conn, a expliqué plus tard que cette directive avait été adoptée pour empêcher les détenues d'utiliser leur soutien-gorge afin de se mutiler ou de blesser autrui, ou pour se pendre. Il admet cependant que d'autres corps policiers en Ontario appliquent cette directive au cas par cas, et que son service réexamine actuellement sa politique.

Ce n'est pas la première fois qu'un tribunal déplore l'existence d'une telle pratique. En 2013, une juge de la Cour supérieure de l'Ontario a conclu que la Police régionale de York avait violé les droits d'une femme, ce qui avait poussé le corps policier à modifier sa directive sur le soutien-gorge.

D'autres corps policiers - notamment ceux de Toronto, Halifax et Calgary, mais aussi la Police provinciale de l'Ontario - n'obligent pas les détenues à retirer leur soutien-gorge, sauf si la sécurité de la femme semble menacée. À Vancouver, par contre, cette directive est systématiquement appliquée pour toutes les détenues.

L'Association canadienne des Sociétés Elizabeth-Fry, qui vient en aide aux femmes interpellées ou arrêtées, estime que cette directive est discriminatoire envers les femmes puisqu'en suivant la même logique de sécurité, il faudrait aussi demander aux hommes - et aux femmes - de retirer leur caleçon.

Si un policier craint qu'une détenue veuille se mutiler ou se suicider, il devrait alors référer le cas en psychiatrie, soutient Kim Pate, directrice de l'organisme. Par contre, obliger une femme à retirer son soutien-gorge peut causer plus de mal que de bien - par exemple dans le cas d'une prévenue qui aurait déjà été victime d'agression sexuelle, estime Mme Pate.

Dans le cas de Chatham, le chef de police insiste pour dire que la détenue a été traitée «avec le plus grand respect et en toute dignité». C'est une policière qui a demandé à la détenue de retirer son soutien-gorge, et la dame a pu garder son chandail après une fouille, a-t-il précisé.

L'avocat de la femme a par contre soutenu que sa cliente avait été «terrifiée et bouleversée» par cette expérience. «Elle ne sort jamais en public sans soutien-gorge, c'était tout à fait nouveau pour elle, a plaidé Brian Ducharme. Ce type d'intimidation est injustifié et j'estime que cette directive devrait être révisée.»