Le gouvernement du Québec estime que la Cour supérieure a erré en rendant un jugement déclaratoire qui suspend la Loi concernant les soins de fin de vie sans entendre les arguments de fond du dossier.

La Cour d'appel du Québec a entendu mercredi les arguments du Procureur général du Québec, qui demande l'autorisation d'en appeler de ce jugement.

Dans sa décision, le juge Michel Pinsonnault estimait que certains articles de la loi québécoise étaient en contradiction avec ceux du Code criminel qui interdit l'aide au suicide et, à la limite, le meurtre.

Le procureur du gouvernement, Me Jean-Yves Bernard, a fait valoir que toutes les précautions ont été prises dans la rédaction de la loi québécoise pour éviter cette contradiction.

Il a soutenu que les tribunaux doivent «présumer que la Loi est à l'avantage du public» et que «les deux lois sont compatibles». Selon lui, «c'est à celui qui le conteste de démontrer que ce n'est pas le cas», une démonstration qui n'a pas été faite dans ce cas-ci puisque le juge Pinsonnault n'a pas entendu les arguments de fond.

La Coalition des médecins pour la justice sociale et Lisa D'Amico, qui sont à l'origine de la demande d'injonction, ont au contraire fait valoir que le juge Pinsonnault a eu raison de souligner une contradiction qu'ils estiment évidente puisque la loi permet à un médecin de provoquer intentionnellement la mort, une infraction claire au Code criminel.

L'avocat de Mme D'Amico, Me Gérard Samet, a reproché au gouvernement du Québec d'être trop pressé d'aller de l'avant, alors que la Cour suprême a donné au gouvernement fédéral jusqu'en février prochain pour éclaircir ce dossier.

Le plus haut tribunal du pays a invalidé, en février dernier, les articles du Code criminel interdisant l'aide médicale à mourir et a accordé au fédéral 12 mois pour rédiger une nouvelle loi reconnaissant le droit aux adultes consentants subissant des souffrances mentales ou physiques intolérables de réclamer une aide médicale pour mettre fin à leurs jours.

L'avocat de la Coalition des médecins pour la justice sociale, Me Dominique Talarico, a rappelé que la santé est un domaine de compétence partagée entre le fédéral et les provinces et que le Québec doit donc attendre de voir si Ottawa produira une législation pancanadienne, comme c'est le cas de l'universalité, par exemple.

Si elle est maintenue, l'injonction pourrait retarder l'entrée en vigueur de la loi au Québec sur l'aide médicale à mourir, au moins jusqu'en février.

Si la cour accepte d'entendre l'appel, toutefois, Québec a déjà indiqué que sa loi entrerait en vigueur dès jeudi. Me Samet a cependant affirmé que de nouvelles démarches seraient aussitôt entreprises pour obtenir une nouvelle injonction si tel était le cas.

Le juge Robert Mainville, de la Cour d'appel, a précisé qu'il rendrait sa décision plus tard mercredi.

La loi, qui précise les exigences à respecter avant qu'un médecin puisse administrer une aide médicale à mourir, a été adoptée à l'Assemblée nationale en juin 2014.