Un pasteur évangélique montréalais influent se porte à la défense du fils du président du Congo-Brazzaville, qui veut s'établir au Canada malgré l'opposition des autorités de l'immigration qui le considèrent comme un kleptocrate ayant pillé les richesses de son pays pour financer son train de vie princier.

La Presse a révélé hier l'ampleur des investissements au Canada de Wilfrid Nguesso, neveu et fils adoptif de Denis Sassou Nguesso, l'homme fort qui a dirigé le Congo-Brazzaville sous un régime de parti unique de 1979 à 1992, puis qui est revenu au pouvoir par la force au terme d'une guerre civile en 1997.

En France, la famille Nguesso fait l'objet d'une enquête judiciaire surnommée «l'affaire des biens mal acquis». Des juges d'instruction enquêtent sur des soupçons de détournements de fonds par les familles de trois chefs d'État africains soupçonnées d'avoir pillé les fonds publics des pays qu'ils contrôlent pour accumuler des fortunes colossales en France.

Fonctionnaires rabroués

Peu avant le dépôt de la première plainte en France, Wilfrid Nguesso a présenté une demande de résidence permanente pour immigrer à Montréal, où sa femme et ses enfants habitent et où il a transféré une partie non négligeable de sa fortune au fil des ans, en plus d'y fonder une filiale de sa compagnie maritime.

Les autorités canadiennes ont d'abord refusé sa demande, car elles disaient avoir des raisons de croire qu'il fait partie d'une «organisation criminelle» coupable de s'être livrée à des détournements de fonds à grande échelle. Mais un juge vient de rabrouer les fonctionnaires, qui auraient été trop expéditifs dans leur refus en ne précisant pas quelle organisation était en cause et quels crimes avaient été commis aux termes du Code criminel canadien pour étayer leur décision. Le dossier a été renvoyé aux fonctionnaires pour étude.

De bons chrétiens

Dans sa demande de résidence, Wilfrid Nguesso a joint une lettre de Joseph Kabuya Masanka, pasteur de l'Église Communauté évangélique de Pentecôte, dont le siège est situé dans le nord-est de Montréal.

Impliqué dans plusieurs groupes et événements religieux au Canada, celui-ci dit bien connaître le demandeur et sa conjointe.

«J'ai constaté de par mes fréquentations et discussions avec Madame Nguesso qu'ils font preuve de valeurs chrétiennes évangéliques et se comportent comme de bons citoyens, respectueux des lois et règlements du Canada», écrit-il.

Joint par La Presse, le pasteur ne s'est pas montré ébranlé par les allégations de crimes à grande échelle contre le peuple congolais, dont la moitié de la population vit avec moins de 1,25$ par jour.

«Je me suis basé sur ce que j'ai vu de sa foi. Quant à son implication politique, son portefeuille, je ne suis pas au courant. Ce sont des allégations, c'est à lui d'aller se défendre auprès des instances qui l'accusent. J'ai vu qu'il avait une famille unie et qu'il respectait la Bible. Je n'ai pas donné mon point de vue sur son comportement dans un autre pays», affirme le religieux.