La Cour supérieure a refusé cet après-midi de réintégrer immédiatement la bâtonnière Lu Chan Khuong dans ses fonctions, tel qu'elle le demandait.

La décision du juge Michel Beaupré vient d'être rendue publique, cinq jours après que l'assemblée générale du Barreau ait renouvelé sa confiance envers sa dirigeante suspendue.

«Malgré qu'à cette étape-ci la Bâtonnière démontre qu'elle subit un préjudice irréparable si elle n'est pas réintégrée, la preuve et les arguments permettent de conclure que son droit [à ne pas être suspendue] n'est pas clair, que la balance des inconvénients ne penche pas en sa faveur et qu'il y absence d'urgence», a écrit le magistrat.

Le juge Beaupré a toutefois accepté la demande de Me Khuong quant à la suspension des travaux d'un comité d'éthique du Conseil d'administration du Barreau.

La décision est intérimaire et pourrait être infirmée lorsqu'un débat sur le fond des arguments aura lieu, en octobre.

Me Khuong a été suspendue de ses fonctions au début juillet, suite à un article de La Presse. En avril 2014, elle a été interpellée par la police de Laval après être sortie d'un magasin Simons sans avoir payé deux paires de jeans griffés. Son dossier a été déjudiciarisé, évitant du coup un procès. Depuis les faits, Me Khuong plaide avoir commis une simple erreur d'inattention, payant une seconde fois des jeans déjà payés.

«Intérêt public»

Dans sa décision d'hier, le juge Beaupré - qui siège au palais de justice de Québec - écrit que «l'intérêt public» est mieux servi en n'ordonnant pas la réintégration immédiatement de Me Khuong.

«Si la Bâtonnière était réintégrée dans ses fonctions, de façon intérimaire et donc incertaine au surplus, la sérénité minimale [au Conseil d'administration du Barreau] serait compromise», selon le juge, notant que la poursuite de 90 000$ contre les administrateurs a «aggravé» le conflit. «L'intérêt public dans le bon fonctionnement des instances du Barreau doit entrer en ligne de compte.»

Michel Beaupré reconnaît que la suspension de la bâtonnière «est de nature à lui causer un préjudice irréparable». Ce n'est toutefois pas suffisant pour la réintégrer dans ses fonctions.

«Prendre un peu de recul»

Dans un communiqué, le Barreau du Québec a pris acte du jugement. «Les affaires de l'Ordre seront donc conduites par le vice-président, Me Louis-François Asselin, nommé lors de la première rencontre du Conseil d'administration le 18 juin dernier, et ce, jusqu'à ce qu'une décision sur le fond du dossier soit rendue», indique le communiqué.

Du côté de Me Khuong, son porte-parole Christian Lévesque a indiqué qu'«elle va prendre un peu de recul, elle va prendre le temps de lire le jugement avec son avocat».