Le conducteur du camion-grue qui a happé mortellement la cycliste Mathilde Blais, en avril, ne sera pas accusé au criminel. Il risque tout au plus des points d'inaptitude et une amende, a appris La Presse.

Le Directeur des poursuites pénales et criminelles de la Cour municipale de Montréal a choisi mardi de porter des accusations en vertu de l'article 327 du Code de la sécurité routière (CSR). Le procureur reproche ainsi au conducteur d'avoir «commis une action susceptible de mettre en péril la vie ou la sécurité de personnes», une infraction qui peut lui valoir quatre points d'inaptitude et une amende allant de 1000 à 3000 $. 

Au terme de son enquête sur l'accident survenu sous le viaduc Des Carrières, sur la rue Saint-Denis, le Service de police de la Ville de Montréal avait recommandé deux accusations. L'une d'elles concernait l'article 327, tandis qu'une autre se rapportait à l'article 341 du CSR, à propos du  «dépassement d'une bicyclette sans espace suffisant à l'intérieur de la même voie de circulation». Cette deuxième recommandation a été rejetée. À l'instar d'une poursuite au criminel. 

Le procureur de la cour municipale a mené «une analyse juridique rigoureuse fondée sur les faits, sur le rapport du technicien de scène ainsi que sur le droit en vigueur», a indiqué le relationniste Gonzalo Nunez. «Il n'y a pas d'accusation criminelle, puisque les faits ne permettaient pas de faire la preuve de la commission d'un acte criminel», a-t-il ajouté. 

L'homme qui était derrière le volant du camion-remorque qui a percuté Mathilde Blais le matin du 28 avril travaillait pour l'entreprise Grues Beauchamp, située à Saint-Eustache. «Le propriétaire est à l'extérieur pour une semaine et il n'est pas possible de le rejoindre», a déclaré la réceptionniste de ce bureau, en guise de réponse à une demande d'entrevue. 

Selon les informations qui ont été fournies par la police à la mère de Mathilde Blais, Geneviève Laborde, le conducteur avait six ans d'expérience. «J'étais partie sur l'impression que le chauffeur était jeune. Alors en tant que mère, j'avais dit "pauvre garçon!". J'ai pensé à toute la culpabilité qu'il devait ressentir», a raconté Mme Laborde lundi, quand La Presse l'a rencontrée. Le «mode pardon» qu'elle avait adopté a changé quand on l'a informée, le 28 juillet, que l'homme derrière le volant n'était pas inexpérimenté. «J'ai trouvé ça amer», s'est-elle rappelée. «Je me disais: il aurait donc pu la dépasser comme il faut. Ça m'a désespéré.»

Pression sur Ottawa 

La publication du rapport du coroner Paul G. Dionne, qui conclut à une «mort accidentelle évitable», a fait grimper la pression sur Transports Canada. La Ville de Montréal, qui a exigé en août que la réglementation fédérale soit modifiée afin de rendre obligatoires les jupes latérales de protection sur les camions a réitéré sa demande mardi.

«On attend toujours un accusé de réception», a souligné la mairesse de Villeray, Anie Samson. À Ottawa, le Nouveau parti démocratique a pressé les conservateurs de soutenir son projet de rendre les jupes de protection obligatoires. «Nous les demandons depuis huit ans», a insisté le député Hoang Mai. «Toute province ou territoire est libre d'exiger des protections latérales sur les camions opérant sur leur territoire», a répondu le secrétaire parlementaire aux transports, Jeff Watson.

La même réponse a été fournie à La Presse, à qui l'on a refusé une demande d'entrevue avec la ministre des Transports, Lisa Raitt.