Le directeur général adjoint de la FTQ-Construction, Éric Boisjoli, a échoué dans sa tentative de faire renverser un jugement en vertu duquel il avait été reconnu coupable d'avoir usé d'intimidation ou de menaces dans le but de provoquer un arrêt de travail sur un chantier.

La décision en appel, tombée juste avant la période des Fêtes, était passée inaperçue jusqu'ici. La Cour supérieure a donc maintenu le verdict de culpabilité qui avait été rendu par la Cour du Québec à l'endroit de M. Boisjoli.

À l'époque des faits dont il est question, soit en 2010, M. Boisjoli n'était toutefois pas directeur général adjoint de la FTQ-Construction, mais directeur de la section locale 791-G, celle des grutiers, un syndicat affilié à la FTQ-Construction.

Les événements en cause s'étaient produits en août et septembre 2010, dans le contexte de la négociation des conventions collectives dans l'industrie de la construction. En guise de moyen de pression, des syndiqués refusaient de faire des heures supplémentaires sur plusieurs chantiers dans le secteur du génie civil.

L'infraction qui était reprochée à M. Boisjoli est d'avoir appelé le copropriétaire d'une entreprise de grues pour lui demander que son grutier, Yannick Beaulieu, ne fasse pas d'heures supplémentaires sur un chantier de Rivière-au-Renard, en Gaspésie. Selon la preuve entendue, M. Boisjoli avait alors dit à l'entrepreneur qu'il y avait danger que les «gars» viennent «coucher la grue» ou «la virer à l'envers» si son grutier faisait des heures supplémentaires.

Or, le grutier en question estimait ne pas faire d'heures supplémentaires. Il travaillait plutôt selon un horaire comprimé - soit moins de journées de travail dans la semaine, mais des journées plus longues - ce qui est fréquent dans l'industrie lorsqu'un ouvrier travaille dans une région éloignée de celle où il réside.

Lors de l'audition de la cause par la Cour du Québec, M. Boisjoli n'avait pas nié avoir tenu ces propos; il avait affirmé qu'il ne s'en rappelait pas. Le dirigeant syndical avait soutenu que les expressions «coucher la  grue» ou «la virer à l'envers» faisaient partie du jargon du métier et que cela signifiait simplement «exercer des moyens de pression» ou cesser de travailler. M. Boisjoli avait soutenu qu'il n'était alors pas question d'endommager l'équipement de l'entrepreneur et que, comme directeur d'une section locale, il n'endosserait jamais un bris de matériel.

La Cour du Québec n'avait pas cru sa version. «Le tribunal rejette comme invraisemblables la version recherchée et l'interprétation subtile de son vocabulaire par le défendeur (M. Boisjoli)», avait-elle écrit.

Le tribunal avait estimé qu'il «ne peut refuser de donner le vrai sens aux mots utilisés lors de conversations et se doit aussi de respecter ceux utilisés par le législateur». Il l'avait donc reconnu coupable d'avoir usé d'intimidation ou de menaces dans le but de provoquer une entrave, un ralentissement ou un arrêt des activités sur un chantier.

En appel, la Cour supérieure a rejeté les arguments de l'avocate de M. Boisjoli. Elle a estimé que les motifs du premier jugement étaient «adéquatement énoncés» et que le verdict était «raisonnablement» appuyé sur l'ensemble de la preuve.

Elle n'a donc pas jugé bon de casser le verdict prononcé par la Cour du Québec.

Fait à noter, M. Boisjoli n'a pas été reconnu coupable en vertu du Code criminel, mais bien en fonction de la loi qui encadre les relations de travail dans l'industrie de la construction. Celle-ci stipule que «quiconque use d'intimidation ou de menace dans le but de provoquer une entrave, un ralentissement ou un arrêt des activités sur un chantier commet une infraction et est passible d'une amende de 1062 $ à 10 629 $ pour chaque jour ou partie de jour que dure l'infraction».

La FTQ-Construction a indiqué à La Presse Canadienne, mardi, que M. Boisjoli avait reçu l'amende minimale. Le comité exécutif n'avait pas encore décidé s'il allait interjeter appel.