Une accusation rarissime au pays a créé une commotion dans le monde policier. Un agent de Toronto a été accusé hier du meurtre non prémédité de Sammy Yatim, un jeune homme de 18 ans tué par balle dans la nuit du 26 au 27 juillet, dans un wagon de tramway de la Ville reine.

Au terme d'une enquête, c'est l'Unité des enquêtes spéciales (UES) de l'Ontario, la «police des polices» de la province, qui a annoncé le dépôt de ces accusations à l'endroit du constable James Forcillo.

Au Québec, un Bureau des enquêtes indépendantes, composé à moitié de civils et d'anciens agents de la paix - comme en Ontario - verra le jour à la suite de l'adoption, en mai dernier, de la Loi modifiant la Loi sur la police concernant les enquêtes indépendantes. Que peut-on apprendre du modèle ontarien? La Presse a posé la question à divers experts.

Q: Quels sont les bienfaits d'organismes tels que le Bureau des enquêtes indépendantes?

R: Le Bureau des enquêtes indépendantes permet de rassurer le public quant à l'indépendance et à la transparence des enquêtes menées à l'endroit des policiers. Sans être une panacée, c'est un système qui apparaît plus indépendant que le système actuel, à savoir des policiers qui enquêtent sur d'autres policiers.

- Massimiliano Mulone, professeur adjoint à l'École de criminologie de l'Université de Montréal.

Q: Quelles ont été les problématiques observées en Ontario avec un tel organisme?

R: Des rapports ont déjà fait état du manque de coopération de la police. Par exemple, la communication et la transmission des notes de la police, de rapports ou de la preuve ont été problématiques avec l'UES, l'organisme chargé des enquêtes en Ontario.

- Abby Deshman, avocate à l'Association canadienne des libertés civiles.

Q: Comment ne pas se buter aux mêmes difficultés?

R: Il faut qu'un tel organisme ait aussi les moyens de contraindre, qu'il ait les moyens de ses ambitions dans les faits, pas que sur papier. Cet organisme ne doit pas être un tigre édenté, pour citer l'ombudsman de l'Ontario.

- Massimiliano Mulone

Q: La présence d'anciens agents de la paix au Bureau d'enquête indépendante est-elle nécessaire?

R: Peut-être que l'encadrement et la formation des personnes civiles permettront éventuellement d'accorder une plus grande place aux personnes civiles dans ce processus. L'expérience nous dira quel est l'équilibre dans tout ça. Le législateur a voulu assurer une certaine expertise pour pouvoir enquêter sur la conduite de policiers, des spécialistes de l'application de la loi, des personnes qui sont des expertes dans ce domaine.

- Claude Simard, Commissaire à la déontologie policière du Québec