Deux avocats montréalais ont déposé une demande pour faire enregistrer le terme « COVID-19 » en tant que marque de commerce — une démarche qui aurait peu de chances de réussir, selon certains experts.

Meriem Amir et Giovanni De Sua ont déposé des demandes le 25 mars pour enregistrer le nom de la maladie causée par le nouveau coronavirus, mais aussi les termes « prévention et soins COVID-19 », selon la base de données sur les marques de commerce de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada.

Ces avocats, qui ne figurent pas sur la base de données du gouvernement fédéral des avocats spécialisés en marques de commerce, ont déclaré dans leur demande que l’utilisation du terme serait liée aux vaccins. Ils n’ont pas répondu à plusieurs demandes d’entrevue, mais des collègues spécialisés dans ce domaine ne comprennent pas pourquoi quelqu’un essaierait de faire enregistrer la marque « COVID-19 ».

« Ces marques de commerce ne seront probablement jamais enregistrées au Canada », a soutenu David Lipkus, avocat spécialisé en marques de commerce au sein du cabinet Kestenberg Siegal Lipkus, de Toronto. Il explique qu’il faut généralement environ deux ans avant qu’une décision concernant une marque soit prise — bien que cela puisse être maintenant encore plus long à cause de la pandémie de COVID-19, justement.

Une « marque » doit passer plusieurs tests avant d’être enregistrée, y compris si le terme est descriptif ou distinctif, a-t-il dit. Or, tenter d’enregistrer « COVID-19 » comme « marque » équivaudrait à faire enregistrer « cancer » ou « diabète », a estimé Me Lipkus.

« On pourrait croire ici qu’il s’agit davantage d’un dossier opportuniste que d’une entreprise qui a légitimement l’intention de créer un vaccin, a-t-il soutenu. J’espère qu’il y aura plusieurs commerçants et entreprises qui pourront utiliser “COVID-19” pour des vaccins et permettre à toutes les entreprises au Canada de l’utiliser — et pas à un seul commerçant de le monopoliser ici au pays. »

Un coup classique

Alan Macek, un autre avocat de Toronto, n’est pas surpris que quelqu’un essaie de faire enregistrer « COVID-19 » comme marque de commerce. « On voit souvent une telle vague quand il y a quelque chose de nouveau dans l’actualité et que les gens en parlent », a-t-il rappelé.

Me Macek explique que les marques de commerce sont généralement acceptées pour un terme inventé de toutes pièces ou une combinaison de mots qui pourraient inclure « COVID », mais il faudrait alors que ce soit « distinct » du nom du virus proprement dit.

Ainsi, d’autres requérants ont déposé des demandes avec des termes liés à la COVID-19. Le 7 avril, MedMira, une société de tests médicaux de la Nouvelle-Écosse, a demandé d’enregistrer la marque de commerce « REVEALCOVID-19 » pour un test sérologique rapide qui détecterait des anticorps fabriqués pour lutter contre le nouveau coronavirus.

L’agence américaine des brevets et des marques de commerce a également vu une augmentation des demandes « COVID-19 », dont beaucoup semblent être « opportunistes », a déclaré Me Lipkus.

Mais l’avocat trouve un réconfort dans ces entreprises qui « libèrent » leurs propriétés intellectuelles pour participer à la lutte mondiale contre la pandémie. Medtronic, qui fabrique des respirateurs très en demande dans le monde, a offert sa propriété intellectuelle à tous ceux qui voudraient en fabriquer.

« De nombreuses entreprises au Canada et dans le monde se rassemblent pour le bien commun et mettent les questions monétaires de côté pour se concentrer uniquement sur un retour à la normale de ce monde », a déclaré Me Lipkus.