(Beni Ammar) «Cléopâtre» est devenue la première reine des ânes du Maroc après avoir triomphé de ses concurrents mâles, un moment historique pour le concours Festibaz organisé dans le centre du pays.

«Je l’ai appelée Cléopâtre en référence à la reine de l’Égypte antique connue pour sa beauté», s’enorgueillit Abdeljalil, son propriétaire, qui a remporté un prix de 2500 dirhams (350 $ CAN) et un sac d’orge pour l’heureuse élue.

Face à «Oscar» ou à «Reine du couchant», la concurrence était rude pour la 12e édition du concours du plus bel âne, organisé dans le village de Beni Ammar. Surtout, c’est la première fois qu’une ânesse décroche ce titre jusque-là réservé aux mâles.  

«C’est un animal dévoué et infatigable, mais il faut le ménager», lance son maître, un paysan de 26 ans.  

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Dans un élan antisexiste inattendu, Mohamed assure être là pour «rendre hommage» à son ânesse.

Après cinq ans d’interruption en raison de difficultés financières, le concours destiné à rendre hommage à cet animal qui «joue un rôle clé dans la vie des habitants du village» a repris fin juillet, explique son organisateur Mohamed Belmou.  

L’âne reste un moyen de transport privilégié dans les régions rurales du Maroc, voire dans certaines vieilles villes où les ruelles étroites restent inaccessibles aux voitures. Partout dans les campagnes, on les voit tirer des carrioles lourdement chargées, peiner sous des montagnes de ballots ou trimer dans les champs.

Mais en même temps, l'animal souffre d’une mauvaise image dans la culture populaire. Se faire traiter d’âne y est considéré comme une insulte.

«Nous voulons réhabiliter l’image de ce vieux compagnon de l’homme», explique Mohamed Belmou.  

«Vive l’âne»

Mohamed, un autre paysan de 47 ans, lui, voit ce concours comme un tremplin pour se lancer dans la production de lait d’ânesse.

«Il paraît que ce lait se vend au prix fort pour ses vertus cosmétiques, j’espère créer une coopérative pour pouvoir exporter», confie-t-il.

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Avant le concours de beauté, une course a opposé une vingtaine d’ânes sur une distance d’un kilomètre.

Dans un élan antisexiste inattendu, Mohamed assure être là pour «rendre hommage» à son ânesse, à contre courant de la tradition du village qui valorise les mâles – et plus généralement de la culturelle traditionnelle marocaine qui, malgré certains efforts pour ouvrir les esprits, considère le genre féminin comme inférieur.

Avant le concours de beauté, une course a opposé une vingtaine d’ânes sur une distance d’un kilomètre, sous le regard amusé d’une foule d’enfants et adolescents.  

Puis l’attention s’est portée sur le concours de beauté organisé sur un terrain vague réservé habituellement aux rares activités sportives de ce village de moins de 5000 âmes.  

Les neuf membres du jury – un vétérinaire, des artistes, un prof de philosophie – ont minutieusement examiné l’apparence des prétendants, leur état de santé et leur complicité avec leur maître.

Pomponnée jusqu’au bout des sabots, avec sa couronne de fleurs et ses lunettes de soleil très glamour, Cléopâtre a ravi les suffrages.