À l’heure où la Société de transport de Montréal (STM) connaît de graves problèmes financiers, beaucoup de ses autobus accueillent gratuitement les passagers en raison de pannes de leur borne de paiement, a appris La Presse.

Un problème majeur de réparation des nouveaux appareils de validation est à l’origine de cette situation coûteuse pour l’organisation.

Depuis le 22 septembre dernier, les chauffeurs d’autobus ont signalé à 13 483 reprises à la STM que le véhicule avec lequel ils quittaient le garage connaissait un problème de borne, selon leur syndicat.

« C’est vraiment pire que jamais. Personnellement, je n’ai jamais vu le niveau [de problèmes] à cette hauteur-là », a affirmé Pino Tagliaferri, le président du SCFP1983, en entrevue téléphonique. En cas de problème de borne, ses membres assurent le service d’autobus sans faire payer les usagers.

La STM confirme connaître de sérieux problèmes de réparation des bornes de paiement depuis quelques mois.

Les employés chargés de les réparer doivent utiliser des clés de chiffrement pour y accéder. Or, les clés dont disposaient deux des garages de la STM « n’étaient plus fonctionnelles », a indiqué jeudi le porte-parole Renaud Martel-Théorêt, par courriel.

« Comme il s’agit d’instruments complexes et faits sur mesure pour les besoins de la STM, le délai de remplacement est important, a-t-il ajouté. Cela dit, les nouvelles clés ont été reçues et seront acheminées aux centres de transport concernés dans les prochains jours. » La réception de ces outils « devrait donc permettre de résorber la situation au cours des prochains jours ».

Chiffres contestés

L’organisation conteste toutefois le nombre de signalements avancé par le syndicat. Jeudi, la STM n’a pas offert un décompte alternatif, mais donnait en exemple la journée du 20 décembre dernier : ce jour-là, « 272 bus de la STM faisaient l’objet » d’un signalement actif en lien avec le fonctionnement de leur borne de paiement.

Malgré les dénégations de la STM, M. Tagliaferri a maintenu que son décompte était valide, hier soir : du 22 septembre 2022 au 8 janvier 2023, ses membres ont signalé un problème de borne à 13 483 reprises pendant l’inspection visuelle qu’ils doivent effectuer chaque fois qu’un autobus quitte un garage.

Une borne avec un problème persistant peut être signalée chaque jour jusqu’à sa réparation.

En moyenne, selon les données du syndicat, 124 autobus feraient l’objet d’un signalement chaque jour depuis la fin septembre. La STM exploite environ 2000 autobus.

« La STM ne semble pas s’inquiéter du problème. Avec le manque d’argent et de financement, je m’arrangerais pour que ces bornes-là fonctionnent », a ajouté le syndicaliste. Mais « la STM, par les temps qui courent, néglige les réparations ».

« C’est frustrant »

Ces pannes de borne à répétition surviennent au pire moment : la pandémie et le télétravail ont grugé la popularité des titres mensuels au profit du paiement à la pièce, pour lequel une borne est essentielle.

Et cette situation n’aide en rien.

Pour « le gars qui achète une carte Opus mensuelle, bien, c’est frustrant de voir qu’il y a des gens qui entrent gratuitement », a expliqué Pino Tagliaferri, ajoutant que les chauffeurs vivaient aussi de la frustration.

Le syndicaliste a rappelé que la STM avait mis fin – cette semaine – à son engagement d’assurer un passage d’autobus aux 10 minutes en pointe sur 31 de ses lignes les plus populaires. En novembre dernier, elle affirmait que son budget pour 2023 était déficitaire de 78 millions.

Les nouvelles bornes de paiement auxquelles les équipes de la STM peinaient à accéder ont été installées entre mai 2019 et novembre 2020, avant d’être mises en service au printemps et à l’été 2021, selon le site web de l’organisation. Elles devraient permettre, à terme, d’utiliser l’autobus ou le métro avec une simple carte de crédit. L’achat et l’installation de ces appareils devaient coûter 17 millions.

« Grâce à leur temps de lecture plus rapide, les nouveaux équipements contribueront à une meilleure fluidité des déplacements à bord du bus et leur ajout aux portes arrière des bus articulés permettra d’optimiser l’embarquement toutes portes », indiquait la STM dans un communiqué de 2019.