La Mission St-Michael, aménagée dans le sous-sol de l’église St. John the Evangelist, à l’angle de l’avenue du Président-Kennedy et de la rue Saint-Urbain, fait ses boîtes.

À la fin du mois, ce refuge pour sans-abri devra quitter le local qu’il occupe depuis 94 ans, au centre-ville de Montréal.

« Nous devons déménager, nous n’avons pas le choix », explique la directrice par intérim, Julie Faulkner, visiblement débordée. « Nous ne faisons pas partie des plans de réaménagement de l’église. Notre bail a pris fin et il n’a pas été renouvelé. »

La petite équipe de la Mission St-Michael a appris la nouvelle il y a plusieurs mois. Le refuge fermera le 23 décembre, mais ne disparaîtra pas pour autant. Il pourra rouvrir progressivement dès le 5 janvier, dans le sous-sol d’une autre église, rue Stanley, près de la gare Windsor, où il vient de signer un bail.

Cela a un coût : son loyer passera de 3000 $ à environ 5000 $ par mois.

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La directrice par intérim de la Mission St-Michael, Julie Faulkner

« Nous n’avons reçu aucune aide des gouvernements, déplore Mme Faulkner. Nous avons fait des demandes, mais on nous a répondu qu’il n’y avait pas d’argent dans les budgets, que nous devions nous débrouiller seuls. On a dû faire une campagne de financement et solliciter des fondations. »

La Mission St-Michael est un centre de jour qui accueille, de 8 h à 15 h, autour de 200 personnes en situation d’itinérance. L’organisme sert deux repas chauds par jour, en plus d’offrir de l’aide alimentaire d’urgence, des vêtements, des douches et du soutien psychosocial.

L’hiver dernier, il avait reçu une subvention de la Ville de Montréal pour se transformer en halte-chaleur, ouverte 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, afin de répondre aux besoins les plus pressants. Mais cet hiver, le refuge n’a pas été sollicité pour prolonger ses heures d’ouverture et restera donc un centre de jour, peu importe la météo.

« Nous n’avons pas les ressources financières, confirme la directrice. Nous aimerions rester ouverts plus longtemps parce qu’il y a un grand vide quand nous fermons nos portes, à 15 h. Où vont nos clients ? Que font-ils ? Les refuges de nuit n’ouvrent pas avant 20 h, et il n’y en a pas assez, de toute façon. »

Aider, sans poser de questions

Une des particularités de la Mission St-Michael, c’est que les clients ne sont pas tenus de dire leur nom ou de répondre à des questions des intervenants. « Ils rentrent, prennent leur café, font ce qu’ils ont à faire, explique Mme Faulkner. On accepte tout le monde. On ne pose pas de questions. On leur donne de la nourriture, des vêtements. S’ils veulent des services, on est là pour les aider, mais on ne pose pas de questions. »

L’arrivée du froid fait craindre le pire.

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La cuisinière Lais Ernesti, avec l’aide d’un employé, prépare le repas du midi dans la cuisine du refuge.

« C’est plus catastrophique que jamais, affirme la directrice. Il n’y a pas de refuges d’urgence en place. De temps en temps, on entend dire qu’il y a 25 lits de plus ici et 25 lits là. Mais nous avons absolument besoin d’un endroit où les gens peuvent aller. Dans la plupart des programmes, comme le logement, les gens doivent pouvoir s’enregistrer. Nos clients sont toxicomanes, consommateurs ; ils ne peuvent pas s’inscrire dans un programme. »

« C’est une véritable crise, ajoute-t-elle. On n’a jamais vu une année comme ça. Tout l’argent est mis dans le logement parce que c’est quelque chose qu’on peut suivre, qu’on peut démontrer et qu’on peut prouver. Mais quand il s’agit de juste aider les gens qui sont dans la rue, il ne semble pas y avoir de financement disponible. »

La Presse a tenté sans succès de joindre la direction de l’église St. John the Evangelist.