« On ne peut pas se plaindre. » Dans la bouche de Kenny Grover, qui possède une boutique de vêtements à Verdun, cette réaction sonne comme un soupir de soulagement.

Le budget de l’administration Plante présenté mardi prévoit une augmentation de 2,9 % des taxes foncières commerciales, sous le plafond de 3 % demandé par la communauté montréalaise des affaires. Cette dernière a réagi positivement après le dévoilement du document.

« C’est moins que l’inflation, alors ce n’est pas si pire. Il faut se réjouir de ça », a poursuivi M. Grover, dont le commerce familial compte 97 années d’activité dans la rue Wellington. « Maintenant, est-ce qu’on va recevoir les services qui devraient aller avec cette augmentation ? Je ne sais pas. » À Verdun, les commerçants paieront en moyenne 1,8 % de plus en 2023 comparativement à 2022.

Dans le nord de l’île, à Ahuntsic, Ginette Gosselin exploite un restaurant dans la rue Fleury. « On va vivre avec et on va faire du mieux qu’on peut avec ça », a-t-elle expliqué à La Presse. Dans son arrondissement, les comptes de taxes des commerçants augmenteront en moyenne de 2,5 % l’an prochain. « Ça aurait pu être pire, ça aurait pu être mieux. »

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Ginette Gosselin, propriétaire du restaurant La Poule Fleury

« Mieux », c’est la nouvelle que recevront plusieurs propriétaires du centre-ville avec leur facture municipale dans quelques semaines : une diminution des taxes foncières. À cause de la stagnation de la valeur des tours de bureaux au cœur de la métropole, les factures de taxes foncières commerciales dans ce secteur diminueront en moyenne de 2,7 %.

L’industrie se réjouit, mais…

À l’Association industrielle de l’est de Montréal, le directeur général Dimitri Tsingakis salue la limitation à 2,9 % des taxes commerciales, en moyenne. « Les augmentations ont été raisonnables dans l’ensemble. C’est perçu positivement parmi nos membres. Maintenant, il faut voir au niveau de l’évaluation foncière de chacun des joueurs. C’est vraiment le compte de taxes qui, ultimement, va faire foi de tout », explique-t-il à La Presse, en évoquant toutefois que les taxes seront plus élevées dans certains secteurs, notamment dans Rivière-des-Prairies–Pointe-aux-Trembles ou encore Anjou, où on attend respectivement des hausses de 7,3 % et 8,6 %.

M. Tsingakis rappelle d’ailleurs qu’il faudra du temps pour déterminer qui subira le plus d’impacts des hausses de taxes. « La taxation, c’est un poste budgétaire. Mais il y en a plusieurs autres qui entrent dans la balance : le coût de l’énergie et la main-d’œuvre, notamment. Il faudra vraiment évaluer l’ensemble pour être en mesure de quantifier l’impact de ce budget sur chaque secteur d’activité, dépendamment du type d’industrie », poursuit le DG.

Ses propos font écho à ceux du président de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, Michel Leblanc, pour qui la décision de limiter la hausse des taxes foncières à 2,9 % pour le non-résidentiel « est une excellente nouvelle dans un contexte difficile pour les PME montréalaises ».

C’est un bon budget dans des circonstances difficiles.

Michel Leblanc, président de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain

Montréal doit « absolument procéder à une revue rigoureuse de ses activités et de ses dépenses », a cependant ajouté M. Leblanc. « La Ville doit mieux investir et mieux dépenser, en ciblant ses actions dans ses champs de compétence. »

L’Institut de développement urbain, qui représente les grands promoteurs et propriétaires immobiliers, est toutefois beaucoup moins positif. « La Ville ne semble pas vouloir corriger le surpoids fiscal imposé au non-résidentiel. Avec un fardeau 4,33 fois plus élevé pour les immeubles commerciaux en comparaison avec le secteur résidentiel, Montréal est de loin la ville au Canada qui éloigne le plus les investissements. En 2021, Montréal imposait un surpoids au non-résidentiel de 4,21, Québec de 3,51, Vancouver de 3,46 et Toronto de 3,36 », a fustigé l’organisation mardi dans un communiqué.