Les clôtures de haute sécurité installées au centre-ville dans le cadre de la COP15 pourraient demeurer en place jusqu’à la mi-janvier, soit un mois après la fin de l’évènement international. Plusieurs déplorent que l’achalandage sera ainsi fortement affecté pendant les Fêtes, surtout aux abords de la place Jean-Paul-Riopelle, condamnée durant toute cette période.

Les avis publics distribués par la Ville de Montréal au voisinage au cours des derniers jours indiquent que les clôtures seront en place jusqu’à mi-janvier, au grand dam de certains commerçants qui craignent déjà des pertes financières considérables en raison des entraves.

D’après plusieurs sources au fait du dossier, la raison est fort simple : le contrat de l’installation de ces clôtures, accordé par la Gendarmerie royale du Canada (GRC) à St-Denis Thompson, stipule que l’entrepreneur a jusqu’au 20 janvier prochain pour retirer l’ensemble des infrastructures de sécurité.

Officiellement, la COP15 se termine le 19 décembre, mais des « négociations ultérieures » pourraient devoir prolonger de quelques jours la présence de délégués internationaux dans la métropole.

Sauf que les vacances annuelles obligatoires de la construction se tiendront cette année du 25 décembre au 7 janvier, forçant l’arrêt de « tous les chantiers de construction » en vertu de la loi.

Or, installer ces imposantes clôtures est long. Leur aménagement a débuté le 14 novembre et se poursuivra jusqu’au 27. Les démanteler demandera donc aussi beaucoup de temps.

« C’est la même situation pour toutes les rues dans le périmètre », confirme le porte-parole administratif de la Ville de Montréal, Philippe Sabourin, en réitérant toutefois que l’administration municipale n’a pas de pouvoir sur le contrat de la GRC. Celle-ci n’a pas répondu aux questions de La Presse sur le sujet, jeudi.

Beaucoup d’incertitudes

Sur la place Jean-Paul-Riopelle, qui sera complètement fermée aux voitures, aux vélos et aux piétons durant toute la durée du congrès afin d’assurer des déplacements sûrs aux dignitaires et aux délégués, certains commerces appréhendent déjà les répercussions des importantes entraves à la circulation en vue.

Pour la copropriétaire du Toqué ! Christine Lamarche, la présence des barrières jusqu’en janvier serait tout simplement incompréhensible. « Je suis sidérée de ça. Je ne comprends pas. Nous, on est fermés du 24 décembre au 8 janvier, mais honnêtement, je m’attendrais à ce que, quand on revient, les clôtures ne soient plus là. Ça sera mon combat de fin de COP15, lâche-t-elle. On reste ouverts, on fera preuve de résilience encore une fois, mais ce qu’on a moins aimé, c’est vraiment de ne pas l’avoir su d’avance. »

On a appris que tout sera fermé dans le coin à la dernière minute. Notre personnel est stressé, on nous demande si on devra faire des mises à pied. Après deux ans de pandémie, ce n’est pas agréable de vivre ça.

Christine Lamarche, copropriétaire du Toqué !

Son groupe dit déjà percevoir les effets sur l’achalandage quotidien, surtout sur l’heure du midi. « On se fait informer, oui, par contre souvent entre l’information qu’on a et la réalité, il y a énormément de distorsions. Et il n’y a pas vraiment de dialogue possible », persiste-t-elle.

« Je n’ai aucune idée si on va s’en sortir, mais malheureusement, c’est un peu ça, la réalité de la restauration », fait remarquer de son côté le propriétaire du Café du Parquet, Lucio Daddario.

Il affirme que la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ), qui possède l’édifice Jacques-Parizeau où son commerce se trouve, a déjà « recommandé à tous les employés de télétravailler à partir du mois de décembre ». « Ces travailleurs, pour nous, ça représente environ 50 % de notre clientèle. Si l’édifice est au ralenti, c’est sûr qu’on n’aura pas de déjeuners. On aura seulement le midi. Alors, si, en plus, personne de l’extérieur ne peut rentrer, on va être très affectés », résume le commerçant.

PHOTO PATRICK SANFAÇON, LA PRESSE

Barricade sur la rue Viger

« Toujours moyen de moyenner »

Le directeur général de la Société de développement commerciale (SDC) Montréal centre-ville, Glenn Castanheira, appréhende plusieurs impacts pour « des institutions comme le Toqué !, ou encore le H3 de l’hôtel Humaniti », qui seront en plein cœur du périmètre et des barrières de sécurité.

« On s’explique vraiment mal pourquoi on compte laisser ces clôtures-là après la COP15. Je comprends qu’il y a un enjeu de ressources, mais ça serait intéressant que les autorités mettent dans la balance ce que ça va coûter aux entreprises, comparativement à ce que ça coûterait de payer des travailleurs pour retirer les clôtures plus rapidement », dit M. Castanheira, qui assure avoir communiqué ses inquiétudes à l’administration Plante.

D’après lui, les vacances de la construction représentent certes un défi, « mais il y a toujours moyen de moyenner, de trouver des solutions ». « On ne parle pas ici de faire de l’esthétisme. On parle de retirer des entraves majeures en plein cœur du plus grand pôle économique du Québec », a déclaré le DG, en déplorant, comme beaucoup d’autres, recevoir l’information « au compte-goutte ».