Plus de recrutement d’effectifs policiers, davantage de travailleurs sociaux, hausse des ressources dans les arrondissements et les postes de quartier : après deux meurtres en 30 minutes mardi, la mairesse de Montréal, Valérie Plante, assure avoir un plan pour que la métropole ne devienne pas « le terrain de jeu des criminels ».

« J’ai un message à envoyer à ceux qui sont de l’autre côté : Montréal ne va pas devenir le terrain de jeu des criminels. C’est non. Mais ça demande de l’énergie, des effectifs, et de penser à l’extérieur de la boîte », a déclaré Mme Plante lors d’une conférence de presse mercredi en fin de journée.

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Reconnaissant que Montréal « traverse une période difficile », la mairesse a appelé à « travailler ensemble », sans « se diviser », alors que la directrice par intérim du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), Sophie Roy, était à son côté.

Si on me demande d’emblée : est-ce que Montréal est sécuritaire ? La réponse est oui. Mais le sentiment de sécurité, lui, est affecté. Il ne faut pas baisser les bras, et personne ici ne le fait.

Valérie Plante, mairesse de Montréal

Elle affirme avoir poussé « un soupir de soulagement », mercredi, en lisant les commentaires du premier ministre François Legault. « On ne lésinera pas sur les moyens pour remettre de l’ordre et protéger les citoyens, a tweeté ce dernier. On appuiera nos forces policières pour que cette violence cesse. On n’acceptera pas, comme gouvernement, que Montréal devienne un champ de tir pour les gangs. »

« Escouades mixtes »

Valérie Plante se dit tout de même « tannée d’avoir de l’argent à la pièce ». Elle affirme d’ailleurs avoir « demandé une solution à la source et adaptée à Montréal » à l’École nationale de police pour arriver à « recruter plus d’effectifs » policiers au cours des prochains mois.

On veut aussi mettre plus de travailleurs sociaux sur le terrain pour dégager les effectifs policiers pour aller ailleurs.

Valérie Plante, mairesse de Montréal

La mairesse vise à « maximiser les escouades mixtes et [à] donner plus d’oxygène aux policiers ».

Avec l’aide de Québec et d’Ottawa – qui est non chiffrée, comme tous les autres engagements –, la Ville entend aussi « augmenter les ressources dans les arrondissements et les postes de quartier ».

Lors d’un échange avec Justin Trudeau mercredi, Mme Plante affirme enfin avoir réitéré la nécessité de « bannir les armes de poing partout au pays », le plus rapidement possible, et de s’attaquer au phénomène des « armes fantômes », produites avec des imprimantes 3D. « Il faudrait que les peines données soient décourageantes », a aussi plaidé la mairesse, ajoutant que les peines bonbons « envoient un message comme quoi quelques mois en prison, on peut s’en sauver et faire pas mal d’argent ».

Manque d’effectifs

La directrice par intérim du SPVM, Sophie Roy, est demeurée prudente mercredi en réponse aux questions sur un possible manque d’effectifs au sein de son corps policier. « Si on me demande si je veux avoir davantage d’effectifs, je vous dis qu’on va toujours en prendre. Mais ce n’est pas uniquement les effectifs qui vont régler le problème », a-t-elle estimé, vantant toutefois son organisation « performante ».

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

Sophie Roy, directrice par intérim du Service de police de la Ville de Montréal

Plus tôt, lundi, une guerre de chiffres avait opposé la Fraternité des policiers et policières de Montréal et l’administration Plante : la première avait affirmé qu’il manquait plus de 70 policiers, la deuxième, qu’elle en avait embauché 229, depuis novembre 2021.

Qui dit vrai ? Tant Mme Plante que Mme Roy ont refusé de le dire clairement. « Actuellement, on a un cycle de retraites parce qu’on a eu des embauches massives à un certain moment donné. Ce n’est pas la première fois qu’on vit des cycles de retraites », a-t-elle néanmoins raisonné, reconnaissant que malgré des embauches, « il y a un surplus » du côté des départs à la retraite de policiers.

Sophie Roy dit surtout s’inquiéter que les policiers « ne sentent pas l’appui » de la population montréalaise. « On ressent le soutien en général dans sa globalité. Par contre, sur le terrain, il y a [des] interventions de certains citoyens [qui cherchent à] nuire au travail des policiers », notamment en les filmant, a-t-elle déploré.

La ministre de la Sécurité publique, Geneviève Guilbault, a réitéré mercredi qu’elle avait investi plus de 200 millions dans la lutte contre la violence armée, se disant « ouverte à en faire plus pour soutenir nos policiers et protéger les citoyens ».

À la Fraternité des policiers et policières de Montréal, le président Yves Francœur a tiré mercredi à boulets rouges sur l’administration Plante. « Nos policiers sont très insatisfaits du soutien manifesté, que ce soit en termes d’effectifs, d’équipements. Tout est toujours compliqué. Ça fait un bout de temps que je suis président, et il n’y a jamais eu autant de ressentiment par rapport à une administration », a-t-il dit sur les ondes du 98,5 FM.

« La population a besoin de gestes concrets », a imploré de son côté le critique en sécurité publique de l’opposition, Abdelhaq Sari, rappelant que son parti avait déjà demandé de bonifier, voire doubler les escouades mixtes en santé mentale, itinérance et violence conjugale. « Depuis 2019 qu’on demande aussi de déployer un projet pilote pour les caméras portatives. L’administration n’a rien fait ! », s’est-il exclamé.