Les policiers ont fait sentir leur présence ce week-end dans le Grand Montréal après le meurtre d’un entrepreneur lié au crime organisé dans un restaurant familial de Laval mercredi. La Sûreté du Québec, en collaboration avec des corps policiers municipaux, a envoyé des agents visiter de nombreux restaurants et bars de la région de jeudi à samedi. La Presse les a accompagnés à Laval vendredi soir.

Ces patrouilles s’inscrivent dans le cadre de l’opération Centaure de lutte contre la violence armée du ministère de la Sécurité publique.

« C’est beaucoup pour mettre une présence, tant pour sécuriser les gens que pour montrer au crime organisé qu’on est présents et qu’on ne souhaite pas que ça arrive encore, comme cette semaine à Laval », dit Catherine Bernard, porte-parole de la SQ, en faisant référence au meurtre de Bernard Cherfan au restaurant La Perle Vietnamienne.

Lisez l’article complet sur le meurtre de Bernard Cherfan au restaurant La Perle Vietnamienne

Ces opérations sont très utiles, ajoute un policier du Service de police de Laval (SPL). Elles permettent de « voir où les bandits se tiennent » et de développer des liens avec les restaurateurs. Il aimerait voir plus de collaboration du genre entre les corps policiers, qui permettent d’agir au-delà du périmètre municipal pour contrer le crime organisé.

Accueils mitigé

À notre arrivée au Carrefour Laval, l’équipe d’agents rencontrée, formée d’une quinzaine d’agents de policiers de la SQ, du SPL et du Service de police de la Ville de Montréal, sort d’une brasserie sportive. Ces derniers ont déjà visité une dizaine d’établissements, ici au Carrefour Laval et au Centropolis notamment, et se dirigent maintenant vers The Keg Steakhouse.

« Moi, je n’ai aucun problème avec ça », dit Pierre-Alexandre Themens, gérant du Keg. « On est super en contact avec eux, on sait qu’on est quand même dans un point chaud à Laval […]. S’ils sentent le besoin de venir ici, on va les accueillir à bras ouverts » même si « pour certains invités ça peut être un peu plus dérangeant comme expérience », note-t-il.

M. Themens pense aussi à l’homicide de mercredi à La Perle. « On aimerait ça que ça n’arrive pas dans notre restaurant. »

Au Lucille’s, le gérant Massimo Maggiore est un peu plus agacé. Ce genre d’opération, « ça arrive souvent […] une fois par semaine ou toutes les deux semaines », dit-il, mais « d’habitude, ils sont quatre ou six », alors qu’aujourd’hui, une douzaine d’agents sont entrés en même temps. « C’est beaucoup » et « c’est intimidant » pour les familles présentes, dit le gérant de l’établissement bondé.

Marisa et Stephano, deux clients qui fument à l’extérieur du Lucille’s, sont du même avis. « Il y a des familles qui mangent ici, des enfants, je ne pense pas qu’ils avaient besoin d’être aussi nombreux », soutient la jeune femme. Elle confie que ses parents vont à La Perle tous les week-ends, mais qu’ils n’ont pas peur « du tout ». « Ça arrive aux gens qui font partie de ce monde », explique Stephano. « Si tu n’es pas dans ce monde, tu es correct », assure-t-il.

Roberto, un autre client, est moins critique. Il décrit son interaction avec les policiers comme « chaleureuse ». « Ils nous ont expliqué pourquoi ils font ça, et ils nous ont expliqué ce qui se passe dans le monde aujourd’hui avec les guns », raconte-t-il.

Le prochain établissement visé est un restaurant où il y a eu un incendie suspect il y a quelques années. Cette visite s’annonce plus délicate on demande à La Presse de rester en retrait.

À leur arrivée au restaurant, les policiers garent leurs véhicules dans un stationnement voisin avant de passer à travers une haie pour gagner l’établissement visé. Ils sont 13 à y entrer.

Le gérant, visiblement irrité par cette visite, se défend rapidement de payer ses taxes et ses comptes. Après des interactions tendues, l’équipe d’agents quitte les lieux.