(Québec) La mairesse de Montréal, Valérie Plante, était « ravie » de la proposition de la Caisse de dépôt et placement sur le projet du REM une semaine avant de mettre à mort le projet de transport collectif, s’étonne le PDG de l’institution financière, Charles Emond.

« J’ai appris il y a 10 jours du gouvernement qu’il y avait eu un appel de la mairesse comme quoi elle voulait faire un autre projet. Lors de la dernière conversation avec elle, il y a deux, trois semaines, elle était ravie avec la proposition écrite qu’on lui avait soumise. Elle avait une place à la table », a souligné M. Emond mardi lors d’une rare mêlée de presse avec les médias, en marge de l’étude des crédits budgétaires du ministère des Finances.

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Charles Emond, PDG de la Caisse de dépôt et placement du Québec

M. Emond affirme qu’il n’est pas du tout amer de la façon dont les choses se sont passées. Mais il ajoute que le nouveau projet devra renoncer au nom « REM de l’Est », une marque déposée de la Caisse.

Lundi, le premier ministre François Legault a annoncé officiellement, avec la ministre Chantal Rouleau et la mairesse de Montréal, Valérie Plante, que CDPQ Infra se retirait du développement du projet de Réseau express métropolitain (REM) de l’Est, qui est désormais sous la responsabilité du gouvernement.

M. Emond souligne que Mme Plante a parfaitement le droit de « changer d’idée pour faire un autre projet ». Mais a-t-elle pris cette décision dans l’intervalle d’une semaine entre la conversation avec M. Emond, au cours de laquelle elle était « ravie », et son appel au bureau du premier ministre pour mettre fin au projet, ou a-t-elle plutôt manqué d’honnêteté ? « Je ne peux pas lire dans sa tête, elle ne m’a pas rappelé », a-t-il dit.

Le cabinet de Valérie Plante a rétorqué que la mairesse était « satisfaite des discussions récentes sur la gouvernance du projet », mais que les « enjeux d’acceptabilité sociale liés à l’intégration urbaine au centre-ville et dans les quartiers de Mercier–Hochelaga-Maisonneuve […] restaient entiers ».

Mais M. Emond conteste également cet argument. Il a affirmé que 70 % des usagers potentiels du REM y étaient favorables. « L’acceptabilité, ce n’est pas 50 % + 1, ce n’est pas non plus 100 %. Pour les usagers, les gens de l’Est, ils étaient en faveur », a plaidé M. Emond.

100 millions pour les études

Le PDG a également confirmé que le gouvernement du Québec lui rembourserait une somme de près de 100 millions pour compenser les coûts de CDPQ Infra, qui livrera en échange toutes les études qu’elle a réalisées.

« On n’est pas sorti du REM de l’Est, on n’a pas embarqué dans le nouveau projet », a-t-il expliqué. Il a d’ailleurs appris que ce « nouveau projet » allait desservir d’autres régions, Laval et Lanaudière.

Je ne pense pas qu’on peut appeler ça torpiller. [Mme Plante] a décidé d’aller vers un autre projet. […] Il ne pourra pas s’appeler le REM de l’Est, parce que c’est une marque déposée de la Caisse.

Charles Emond, PDG de la CDPQ

« Légalement, ce nom appartient à la Caisse. On trouvera une solution. Peu importe le nom qu’il portera, M. Legault et Mme Plante ont été clairs : le projet doit se réaliser », a fait savoir Ewan Sauves, attaché de presse du premier ministre.

Le gouvernement Legault s’est fait accuser de son côté d’avoir dilapidé ces 100 millions de dollars. La ministre Chantal Rouleau a répliqué qu’une bonne partie des études faites par la Caisse pourront être réutilisées, puisque « 85 % du tracé est conservé ». Le PDG Emond a toutefois souligné que le REM de l’Est était tellement avancé qu’il ne manquait que « 10 % » du travail pour qu’un consortium soit prêt à lancer les appels d’offres pour entreprendre les travaux. Le gouvernement du Québec retourne à la planche à dessin avec son nouveau projet.

Plus de frais pour Québec

Puisque le gouvernement du Québec sera maintenant responsable du projet de transport collectif, il devra trouver de la place dans ses livres comptables pour son budget de 10 milliards. Le ministre des Finances, Eric Girard, n’y voit aucun problème.

« S’il est nécessaire d’ajouter 10 milliards au Plan québécois des infrastructures (PQI) pour quelque projet que ce soit, le prochain gouvernement, le prochain ministre des Finances aura la capacité de le faire. Parce que le bilan est excellent », a-t-il dit durant l’étude des crédits.

Il ne veut toutefois pas annoncer maintenant que le budget du PQI sera rehaussé puisque nous sommes « avant les élections ». Mais il y a de la place pour augmenter « significativement » les budgets dans le budget de 2023, a-t-il souligné. « Il n’est pas question de couper dans le PQI. »