La Société de transport de Montréal (STM) s’est dite vendredi dans une « situation financière critique » et avoue ignorer comment elle pourra boucler l’année.

Déserté par ses usagers, le réseau continuera à offrir un service marginalement réduit en 2022 et retardera l’entretien de ses nouveaux trains afin d’économiser des fonds. Malgré ces efforts, le budget de l’organisation affiche un déficit de 43 millions, qu’elle tentera de combler dans les prochains mois.

Au centre du problème : « une chute drastique, dramatique » de la fréquentation du réseau, conséquence directe de la pandémie, a décrit Éric Alan Caldwell, président du conseil d’administration de la STM. Les usagers sont graduellement revenus tout au long de 2021, mais le variant Omicron a fait dérailler la reprise à la fin de l’année.

PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE

Éric Alan Caldwell, président du conseil d'administration de la STM.

M. Caldwell témoignait devant la Commission des finances de la Ville de Montréal, qui passe en revue les différents services municipaux.

Selon les données présentées aux élus municipaux, la fréquentation du réseau de la STM s’est lentement redressée à partir de l’hiver dernier. Elle était en baisse de « seulement » 40 % début décembre 2021 par rapport à décembre 2019, sa meilleure performance depuis le début de la pandémie.

Début janvier 2022, par rapport à des journées équivalentes de 2019, la fréquentation était en berne de 66 %.

Desserte et entretien en berne

Cette baisse de fréquentation a toutefois permis à la STM de diminuer de 5 % sa desserte sur le métro et de 3,5 % dans les bus en 2021 sans, à son avis, trop d’incidences sur la clientèle. La STM compte prolonger ces réductions de service en 2022, afin d’économiser 25 millions.

Éric Alan Caldwell a assuré que ces opérations étaient effectuées « de façon chirurgicale et ciblée pour offrir un service à la hauteur des attentes des clients tout en assurant une saine gestion financière de l’entreprise ».

La STM a aussi décidé de reporter à 2023 les premières opérations d’entretien majeur de ses nouvelles rames Azur, alors que certaines roulent depuis six ans et ont parcouru 800 000 km. Ce report fera économiser 12 millions à l’organisation.

« Il n’y aura pas d’enjeu de sécurité, mais il pourrait y avoir des enjeux de fiabilité, par contre », a dit Luc Tremblay, directeur général de la STM. L’organisation était en mesure d’évaluer l’incidence d’une telle décision sur ces anciennes rames, mais n’est pas en mesure de prédire le comportement de ses jeunes Azur.

Il a ajouté qu’Alstom, le constructeur des trains, avait donné son approbation à cette décision et que la responsabilité de l’équipementier français en cas de problème majeur dans les prochaines années ne serait donc pas remise en question par ce report.

C’est un peu comme sur votre voiture : il y a des recommandations [du constructeur] d’aller au garage, mais il n’y a pas toujours des conséquences.

Luc Tremblay, directeur général de la STM, à propos du report de l’entretien des rames Azur

La STM a aussi décidé de ne pas pourvoir des postes vacants, de suspendre le programme de bonus des gestionnaires et de consolider les assurances collectives des employés afin de réaliser des économies.

« Un cri du cœur »

Même avec ces efforts, la STM affiche un budget déficitaire pour 2022 : 43 millions manquent à l’appel.

« Sans nouvelle source de revenus dès 2022, un déficit serait inévitable, ce qui est interdit par la loi », note l’organisation dans sa présentation.

Avant même que la COVID-19 frappe, la situation financière de la STM était « déjà précaire », a fait valoir l’organisation, vendredi. Elle dénonce la croissance insuffisante des transferts publics, alors que ses coûts de rémunération augmentent de façon importante chaque année.

Éric Alan Caldwell a souligné que le modèle de financement de la STM n’était pas viable.

La solution passe vraiment par de nouvelles sources de revenus.

Éric Alan Caldwell, président du conseil d’administration de la STM

« C’est un cri du cœur. Un cri du cœur qui s’adresse à l’ensemble de nos institutions », a continué l’élu municipal, récemment nommé à la STM. « Force est de constater que dans ce contexte de crise, l’ensemble des chutes des revenus tarifaires n’ont pas été compensées. Il faut aussi rappeler que le financement pérenne du transport collectif, les structures de financement ne sont pas adaptés à l’évolution des dépenses. »

Une augmentation de la taxe sur l’immatriculation des véhicules avait été votée par la Communauté métropolitaine de Montréal, mais n’a pas pu être appliquée par la Société d’assurance automobile du Québec pour des raisons techniques, a révélé le conseiller municipal Sylvain Ouellette.

La STM affiche un budget de 1,6 milliard.

71

Les 71 nouveaux trains Azur de la STM desservent maintenant 100 % de la ligne orange et environ 80 % de la ligne verte.

Source : Société de transport de Montréal (STM)