Le chef de police de Montréal, Sylvain Caron, persiste et signe : 25 ans après l’inauguration des postes de quartier dans la métropole, son service doit changer de modèle s’il veut survivre.

En entrevue avec La Presse, le chef Caron a réitéré que cette « modernisation » doit passer par une réduction du nombre de postes, mais a refusé de donner un nombre précis de fermetures ou de nommer les quartiers visés. Il veut tenir des consultations auparavant.

« On est rendus à un point de bascule, a-t-il dit en entretien téléphonique, vendredi matin. Il faut trouver une façon différente de desservir la population. »

La veille, le chef Caron avait révélé aux élus montréalais qu’il comptait leur soumettre, au cours de l’année 2022, un projet de réforme en profondeur du service. Au cœur de son plan : faire comprendre aux Montréalais que ce sont les policiers qui les protègent, pas les postes de police. Et ainsi pouvoir faire des économies importantes en rassemblant ses troupes dans moins de postes.

« Malheureusement, le bâtiment actuellement (et c’est correct, c’est humain) signifie un gage de sécurité. Ce n’est pas ça que je veux. C’est la présence policière active sur le territoire qui doit devenir un gage de sécurité, a-t-il dit en entrevue. Je divise mes forces partout sur le territoire. Comme j’ai dit [jeudi] : on est partout et on n’est nulle part en même temps. À des endroits, les policiers et policières sont surchargés de travail, alors qu’à d’autres endroits, c’est une charge de travail correcte. »

Les choses ont changé en 25 ans, souligne M. Caron. « Regardons juste en termes légaux : les exigences quand on travaille des dossiers. En termes de normes du travail : les congés parentaux, les congés de maternité, les retraits préventifs. Tout le contexte social et les normes qui ont changé font en sorte qu’en 2022, on n’a plus le modèle qu’il faut pour arriver à respecter la capacité de payer des citoyens et à offrir un service », a-t-il ajouté, alors que son service affiche un bilan largement déficitaire pour 2021.

L’opposition monte au créneau

L’opposition officielle à l’hôtel de ville de Montréal a dénoncé vendredi qu’une réforme majeure du Service de police de la Ville de Montréal fasse son apparition sur la place publique 60 jours à peine après les élections municipales. Il aurait été plus démocratique d’en faire un sujet de débat public, a fait valoir Abdelhaq Sari, porte-parole en matière de sécurité publique.

« L’administration Plante s’apprête à éliminer plusieurs postes de quartier. C’est ce qu’on comprend, a dit M. Sari. Il y a deux possibilités : soit l’administration était au courant et elle cachait l’information à la population pendant des mois, soit elle a été surprise et elle l’a appris en même temps que tout le monde. […] Dans les deux cas, c’est un manque de compétence et de leadership de cette administration. »

Sur le fond des choses, l’élu dénonce la volonté de fermer des postes. « Un poste de quartier rassure les personnes âgées, les personnes vulnérables. Il a quand même un certain rôle, a-t-il dit. Est-ce que le processus qu’on voit actuellement nous rassure ? Pas du tout. »

La Fraternité en accord

À la Fraternité des policiers et policières de Montréal, on accueille à bras ouverts le projet de Sylvain Caron.

Les effectifs sont actuellement dispersés sur le territoire, ce qui cause un surplus de travail et de l’épuisement, selon Yves Francœur, président du syndicat. « Ce dont on a besoin, c’est du personnel sur le terrain, sur la rue. Pas dans les bâtisses », a-t-il fait valoir.

« On est rendus au point où les élus et les citoyens doivent prendre une décision : on maintient le modèle et on ajoute des policiers. Ou on dit que le modèle n’est pas viable et on réduit le nombre de postes », a dit M. Francœur. « J’espère juste qu’ils vont prendre la bonne décision pour les citoyens. »

M. Francœur a indiqué que son « idée n’est pas arrêtée » quant au nombre optimal de postes de quartier pour un territoire comme Montréal. Son organisation participera aux consultations à venir, a-t-il indiqué.