Des candidats et des collaborateurs d’Ensemble Montréal montrent du doigt Denis Coderre et d’importantes difficultés de communication au sein de l’équipe de campagne pour expliquer la défaite.

Dans une série d’entrevues avec La Presse réalisées depuis la défaite cinglante de dimanche, plusieurs d’entre eux ont décrit la controverse des contrats de consultation de M. Coderre comme le Waterloo de la campagne.

« C’est la défaite de Denis Coderre qui m’a tiré en bas », a affirmé sans ambages Hadrien Parizeau, candidat vedette d’Ensemble Montréal dans Ahuntsic-Cartierville, dans un message à La Presse. Il a refusé notre demande d'entrevue. « Je ne le prends absolument pas personnel. […] On se crache dans les mains et on recommence. » Les autres interlocuteurs de La Presse ont refusé d’être identifiés, craignant des répercussions sur leur vie professionnelle.

En entrevue à Radio-Canada, lundi, M. Parizeau a reconnu que la position « alambiquée » de M. Coderre sur la défense de la langue française l’avait « rendu mal à l’aise » et avait été un irritant pour les électeurs francophones.

Dans les coulisses, des collaborateurs de la campagne pointent effectivement des décisions du chef d’Ensemble Montréal – et particulièrement sa gestion de la controverse des contrats au privé – comme facteur de la défaite.

Trois collaborateurs ont indiqué que c’est à partir de ce moment qu’ils ont compris que M. Coderre ne serait pas en mesure de reprendre l’hôtel de ville de Montréal. « Jusqu’à Tout le monde en parle, c’était [coude à coude] », a affirmé l’un d’eux.

Jusque-là, Denis Coderre tentait de faire essentiellement campagne sur la sécurité, un enjeu identifié comme extrêmement important pour les Montréalais dans une étude commandée à la firme Ad Hoc, selon nos informations. Le document révélait que l’habitation se trouvait aussi en haut de la liste, mais Ensemble Montréal a déterminé que Valérie Plante avait déjà monopolisé cet enjeu.

Le plan de match « sécurité » n’a pas tenu : le dimanche 31 octobre, Denis Coderre a été comparé à Donald Trump par l’animateur Guy A. Lepage pour son refus de publier ses déclarations de revenus. Dans les jours qui ont suivi, il a révélé la somme de ses revenus, avant que la presse ne lève le voile sur l’identité de ses clients, dont un important promoteur immobilier.

« Les gens étaient éparpillés »

Par ailleurs, La Presse a pu confirmer que l’état-major de la campagne n’était pas physiquement réuni jour après jour dans un même lieu pendant les dernières semaines, comme c’est habituellement le cas. Une partie d’entre eux se trouvaient dans la permanence du parti, au coin du boulevard Crémazie et de l’avenue Christophe-Colomb, alors que d’autres se trouvaient dans un local loué près du centre-ville de Montréal. Les réunions virtuelles étaient la norme chez Ensemble Montréal, contrairement à Projet Montréal, dont l’état-major était concentré dans un bureau du boulevard René-Lévesque Est. « Les gens étaient éparpillés », selon un participant. « Il y avait un enjeu de cohésion et de communication. »

Les communications étaient effectivement difficiles, selon plusieurs témoins, et l’harmonie ne régnait pas entre les responsables. « Un problème d’ego et de manque de leadership », diagnostique un collaborateur avec de l’expérience dans un autre ordre de gouvernement. « L’organisation n’avait aucun sens. »

Deux sources ont toutefois souligné qu’au-delà des tensions internes chez Ensemble Montréal, c’est le taux de participation très bas qui explique surtout la défaite de Denis Coderre. Plusieurs quartiers périphériques et multiethniques – souvent plus favorables à M. Coderre – ont enregistré un taux d’abstention important, tandis que plus de 40 % des électeurs du Plateau-Mont-Royal, de Rosemont-La Petite-Patrie et de Mercier–Hochelaga-Maisonneuve se sont exprimés.