La mairesse sortante de Montréal, Valérie Plante, appelle Québec à l’action dans le dossier des délais raisonnables à la cour municipale, où près de 35 000 dossiers d’infraction pourraient être annulés et faire perdre près de 7 millions à la Ville en vertu d’un récent jugement.

« Ce sont des fonds dont la Ville se prive. Et on s’entend, je n’ai pas beaucoup de marge de manœuvre quand il est question de finances. Je ne peux pas faire de déficits et j’ai besoin de toutes les sources de financement intéressantes, dont celle-là », a réagi Mme Plante, lundi matin.

Plus tôt, La Presse rapportait que la saga judiciaire opposant la Ville à la décision de la juge Line Charest, en 2018, d’arrêter le processus judiciaire dans un dossier d’infraction au règlement municipal – pour cause de délai déraisonnable – s’est terminée le 17 septembre. Résultat : 34 577 dossiers d’infraction au code municipal pourraient être visés par un arrêt du processus judiciaire, ce qui équivaut à 6,8 millions de dollars d’amendes, de frais et de contribution à la Société de l’assurance automobile du Québec. La Ville risque de ne jamais toucher aux montants de ces amendes, puisque le délai de traitement est jugé déraisonnable.

Valérie Plante dit avoir « sonné l’alarme » à quelques reprises, avec les ministres de la Justice Sonia LeBel et Simon Jolin-Barrette. « C’est important, parce que c’est très lourd, ce qui se passe à Montréal », insiste la mairesse sortante.

Il y a plusieurs autres villes où il n’y a pas cette lourdeur de devoir passer devant un juge de façon systématique pour toutes les infractions. On demande cet assouplissement législatif. On en a besoin.

Valérie Plante, mairesse sortante de Montréal

Ce que la Ville réclame est la création d’un « régime de sanctions administratives pécuniaires ». Mme Plante dit en avoir fait la demande à quelques reprises. « On nous a dit que c’était intéressant, mais je ne sais pas pourquoi ça ne va pas plus rapidement, honnêtement », note-t-elle.

« Les juges se retrouvent avec un nombre incroyable de cas. Et la ville de Montréal, présentement, est un peu unique dans son genre au pays à avoir cette lourdeur. On veut juste faciliter, alléger le fardeau administratif pour les juges », a encore insisté la mairesse sortante à ce sujet.

Au cabinet du ministre de la Justice, Simon Jolin-Barrette, on indique que « des discussions sont en cours entre la Ville de Montréal et le ministère des Affaires municipales et de l'Habitation (MAMH) pour l'instauration d'un régime de sanctions administratives pécuniaires ». « Le ministère de la Justice collabore avec le MAMH », avance l’attachée de presse, Elizabeth Gosselin.

Prudence sur le statut intermittent

Fin septembre, en présentant un aperçu de sa plateforme, le candidat à la mairie Denis Coderre a promis de réclamer un statut intermittent pour les artistes, qui leur assurerait, selon lui, un salaire et une sécurité d’emploi entre deux contrats. Lundi, l’ex-maire a d’ailleurs proposé d’imposer une nouvelle taxe aux propriétaires de panneaux publicitaires de Montréal afin de créer ce statut intermittent.

Valérie Plante, quant à elle, demeure prudente. « L’idée est intéressante, mais encore faut-il voir si c’est la responsabilité de la Ville de venir rajouter un salaire, si je comprends bien. Le problème, c’est qu’on ne sait pas ce que c’est, on ne sait pas comment ça serait fait. Les artistes méritent qu’on s’intéresse vraiment à leur sort », a-t-elle réagi lundi, en appelant M. Coderre à « expliquer concrètement » ce que la mesure fera pour soutenir les artistes, et en combien de temps elle serait applicable.

Le parti de la mairesse sortante a par ailleurs présenté une série d’engagements en culture, dont une enveloppe de 12 millions pour le projet de la Maison de la chanson francophone dans la bibliothèque Saint-Sulpice.

« Il est trop tôt pour avoir cette conversation », a toutefois dit Mme Plante lorsqu’interrogée à savoir si elle prendrait en charge l’entretien du bâtiment si le projet allait de l’avant. « Je ne veux pas m’avancer tout de suite. Le diable est dans les détails », a-t-elle soulevé.

Son administration s’engage également à créer 900 places supplémentaires dans des ateliers d’artistes, en vertu d’une entente de 30 millions signée avec le gouvernement, ainsi qu’à créer un « lieu de création » pour les compagnies de théâtre anglophones en rénovant l’ancienne Caserne 14, rue Saint-Dominique. Projet Montréal verserait enfin 1 million par année aux « petits lieux privés de diffusion artistes » et aux cinémas de quartier, et doublerait les enveloppes budgétaires vouées aux œuvres murales urbaines. Un lieu d’entreposage serait aussi aménagé dans le Quartier des spectacles pour y augmenter la capacité d’entreposage.