(Montréal) Avant la pandémie, on pouvait venir au CHUM accompagné pour certains types de chirurgie mineure, mais la capacité d’accueil limitée, couplée à de strictes mesures sanitaires, a changé la donne depuis mars 2020.

Faute d’avoir quelqu’un à leurs côtés, les patients du Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM) peuvent compter sur un service de messagerie texte qui assure un suivi sur les différentes étapes de l’opération à un ou des proches.

L’hôpital s’est tourné vers un service qui existait depuis déjà quatre ans, mais qui était toutefois réservé pour certains scénarios. Depuis janvier, le service de messagerie texte est proposé à l’ensemble des patients qui subissent une chirurgie au CHUM.

« Le retour qu’on a eu est incroyable », explique le chef infirmier Alexandre Mignault. « Ça permet de diminuer le niveau d’anxiété des familles », remarque-t-il. Les divers sondages effectués confirment que le taux d’appréciation du service est de 4,5/5.

Cet exemple n’en est qu’un parmi tant d’autres qui illustrent la façon dont la technologie transforme l’expérience entre le patient et le personnel soignant depuis quelques années, particulièrement depuis la pandémie.

Le magazine américain Newsweek nommait d’ailleurs le CHUM dans son palmarès des hôpitaux les plus innovants au monde. L’institut montréalais occupait le premier rang canadien de l’édition 2021 du World’s Best Smart Hospital.

Tout comme le Centre hospitalier de l’Université Laval (CHUL) à Québec, le centre hospitalier montréalais est doté du robot Cobas pouvant analyser 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, des milliers de tests de dépistage de la COVID-19.

Quoique l’établissement possède d’autres appareils impressionnants, ce sont des services en apparence plus simple qui semblent avoir le plus d’impact auprès des patients, comme le service de messagerie ou encore le centre d’appels de l’hôpital.

Ainsi, depuis mars 2020, chaque personne ayant subi une chirurgie au CHUM reçoit le numéro de téléphone unique après son intervention. Ce qui lui permettra de joindre le centre d’appels ouvert 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 pour un suivi postopératoire. Qu’il s’agisse d’une chirurgie au genou ou d’un remplacement de la hanche, une infirmière clinicienne se tient au bout du fil pour répondre aux questions des patients et offrir des conseils personnalisés. Là encore, le taux de satisfaction est élevé, soit 85 %.

L’intelligence artificielle joue un grand rôle dans l’acheminement des appels. À terme, l’algorithme permettra d’identifier les besoins, de répertorier, de classer les symptômes indiqués par le patient au téléphone, pour répartir les appels de manière plus efficace aux bons intervenants, explique la directrice de la coordination réseau au CHUM, Marie-Ève Desrosiers.

La force de l’automatisation résidera dans l’identification des besoins pour mieux prédire la séquence d’appel et les actions à prendre.

Déjà, les améliorations apportées pour permettre aux employés de prendre de meilleures décisions font leurs preuves.

« Plusieurs patients nous confirment qu’autrement, ils se seraient présentés à l’urgence » pour des questions qui peuvent facilement être traitées au téléphone ou des situations qui peuvent bénéficier d’un soutien à distance, explique Mme Desrosiers.

Le manque de personnel étant un enjeu dans le milieu hospitalier, rappelle-t-elle, si l’on peut éviter que des personnes se présentent à l’urgence inutilement, cela libère des infirmières qui peuvent se concentrer sur d’autres patients.

Au 31 mars 2021, près de 80 000 membres étaient inscrits à l’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec. De ce lot, 1347 avaient un droit d’exercice limité pour participer à la lutte contre la pandémie de COVID-19. Plus de la moitié des travailleurs et travailleuses exerçaient leurs fonctions à temps plein, soit 64 %, le plus haut taux en 20 ans, indique-t-on sur le site internet.

L’idée n’est donc pas de remplacer des travailleuses par des machines ou de déshumaniser les soins. Le but est plutôt de faciliter la tâche au personnel de la santé et aux patients pour offrir une expérience optimale.

Plus d’entrepreneurs dans le domaine de la santé

Marie Josée Lamothe, professeure à la Faculté de gestion Desautels de l’Université McGill et directrice académique du Centre Dobson pour l’entrepreneuriat, constate un engouement pour le domaine de la santé dans les entreprises en démarrage qu’elle supervise.

Pour plusieurs étudiants et entrepreneurs, l’idée n’est pas de remplacer des travailleurs par des machines ou de déshumaniser les soins, mais plutôt de développer des solutions centrées sur le patient pour prévenir et guérir les maladies.

L’ancienne directrice du bureau montréalais de Google est particulièrement « ravie de constater la montée fulgurante de l’innovation entrepreneuriale » dans le secteur de la santé. Devant tant d’intérêt, le Centre Dobson lancera en octobre un programme spécifiquement dédié aux entrepreneurs qui veulent œuvrer dans ce domaine.

Le Centre rassemble en tout 450 « startups » qui ont levé plus de 1 milliard de fonds en démarrage au cours de la dernière année malgré la pandémie.

Une application pour les diététistes

Désormais, les entreprises québécoises n’hésitent plus à faire leur place. Le fondateur de la clinique Equipe Nutrition, Guillaume Couture, fait partie des premiers à avoir utilisé l’application Keenoa.

Les 55 professionnels de sa clinique s’en servent pour échanger avec leurs patients. Ces derniers peuvent prendre une photo de leur repas.

L’application reconnaît les aliments grâce à l’intelligence artificielle et les identifie. Ce qui assure aux nutritionnistes un meilleur suivi de ce qu’ont mangé leurs patients durant la semaine en plus de pouvoir leur offrir des conseils pour réajuster le tir.

Il est aussi possible de prendre des notes et d’échanger en direct avec un professionnel qui peut suggérer en temps réel d’ajouter une portion de yogourt ou de protéine à son assiette, par exemple.

Exit, les journaux alimentaires papier, les oublis, et trous de mémoire concernant ce qu’on a mangé l’avant-veille. De toute façon « personne n’aime tout noter avec un papier et un crayon », lance la co-fondatrice de l’application, Anne-Julie Tessier pour expliquer ce qui l’a mené à créer l’outil en 2017.

Elle-même nutritionniste, elle a longtemps utilisé les journaux écrits à la main qui sont toujours la norme dans l’industrie. « Il y avait un besoin pour un produit accessible et le fun à utiliser », ajoute l’entrepreneure qui indique qu’aucune autre application offerte n’assurait une lecture de données aussi précise, avec la reconnaissance de photo intégrée.

Par ailleurs, les autres journaux alimentaires qu’on retrouve en ligne ne sont pas connectés avec une plateforme en temps réel pour communiquer avec les nutritionnistes, précise la jeune femme.

« Les patients disent que c’est enfin hyper facile de suivre son alimentation et que ça augmente leur motivation pour atteindre leurs objectifs nutritionnels », rapporte-t-elle fièrement.

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Cet article a été produit avec l’aide financière des Bourses Facebook et La Presse Canadienne pour les nouvelles.