Valérie Plante refuse catégoriquement d’envisager l’abolition d’une des cinq stations du prolongement de la ligne bleue du métro, un scénario évoqué par la ministre déléguée aux Transports en entrevue à La Presse plus tôt cette semaine.

« Je ne crois pas qu’on y gagnerait quoi que ce soit, a lancé la mairesse de Montréal en point de presse, mercredi matin. Quand on construit, on construit pour l’avenir. Avoir cinq stations est absolument crucial. »

La Presse révélait cette semaine que le projet du prolongement de la ligne bleue est plongé dans un véritable fouillis de gouvernance. Les retards s’accumulent et les coûts prévus pour le projet ont bondi de 3,9 à 6,1 milliards depuis 2018.

La ministre déléguée aux Transports et responsable de la Métropole, Chantal Rouleau, souhaite que le budget du projet revienne autour de 4,5 milliards.

Elle a mandaté à cette fin le mois dernier un « groupe d’experts » qui devra revoir de façon significative le prolongement de 5,8 kilomètres pour retrancher plus de 1,5 milliard aux coûts estimés.

Scénario à quatre stations

En entrevue lundi, Chantal Rouleau a dit souhaiter que le prolongement compte cinq stations, du métro Saint-Michel jusqu’aux Galeries d’Anjou.

Elle a toutefois précisé que le groupe d’experts ne pourra « négliger les scénarios comparatifs », comme la suppression d’une des cinq stations, « ce qui va nous permettre de prendre les meilleures décisions ».

Valérie Plante souligne que la Ville a été « très proactive » depuis octobre dernier. La mairesse a elle-même envoyé une lettre au premier ministre François Legault pour lui suggérer des pistes d’économies.

« J’ai soumis des idées, par exemple avoir moins de points d’entrées et sorties [dans les stations], ou retrancher des espaces de stationnement », a-t-elle expliqué.

« Comment peut-on faire plus de projets d’habitations pour augmenter les sources de revenus ? a-t-elle poursuivi. Mais pour moi, ce qui a été très clair, c’est que nous ne pouvons réduire [le nombre] de stations. »

Rapport attendu en juin

Des dirigeants de la STM, de la Ville de Montréal et de l’Autorité régionale de transport métropolitain (ARTM) siègent entre autres sur le comité d’experts qui devra rendre ses recommandations à la ministre Rouleau le 23 juin.

La dernière mouture du prolongement de la ligne bleue — un projet dans l’air depuis 40 ans — devra ensuite être modifiée considérablement pour abaisser la facture.

Le projet devra également être revu pour s’arrimer avec le REM de l’Est, un projet de train léger de 10 milliards piloté par une filiale de la Caisse de dépôt et placement du Québec.

Gouvernance « déficiente »

La structure de gouvernance du projet de la ligne bleue, aujourd’hui écartelée entre 14 comités et jugée totalement « déficiente », pourrait par ailleurs être revue à la suite de cet exercice, a-t-on appris.

Pendant que le flou subsiste, le bureau de projet de la STM engrange des coûts de fonctionnement de 4 millions de dollars par mois, selon des documents internes obtenus par La Presse.

Qui plus est, chaque mois de retard au projet fait gonfler de 15 millions la facture du projet, sans aucune valeur ajoutée, selon nos informations.

La STM estime ne pas être en mesure de livrer le prolongement de la ligne bleue avant au moins 2027, dans l’état actuel des choses.

Rouleau contre-attaque

La controverse autour du retrait potentiel d’une des cinq stations — et le fouillis de gouvernance du projet — ont rebondi à l’Assemblée nationale, mercredi.

Le député libéral Enrico Ciccone, porte-parole en matière de transports, a demandé à Chantal Rouleau de s’engager à conserver l’intégralité des cinq stations. Elle a contre-attaqué en rappelant les déboires du « Train de l’Est », un projet conçu sous la houlette du gouvernement libéral de Jean Charest.

« Je veux juste vous rappeler, M. le Président, qu’en 2012, lorsque le Train de l’Est a connu des déraillements incroyables en doublant les coûts, le Parti libéral a créé un comité de réflexion pour essayer de remettre les choses sur les rails. »

Elle a rappelé que les libéraux avaient retranché une station, celle de Charlemagne, au projet du train de l’Est.

Selon Chantal Rouleau, le mandat de son comité d’experts est « clair » et vise à « réaliser ce projet (la ligne bleue) tel que promis à la population depuis 40 ans ».

« Je veux juste rappeler aussi qu’il y a seulement le Parti libéral qui n’a pas proposé de moyen de transport structurant pour l’est de Montréal dans la dernière plateforme électorale », a lancé la ministre, bombardée de questions à Québec.