Montréal devra nettoyer un ruisseau de l’ouest de l'île devenu un « égout à ciel ouvert » par sa faute, vient de décider la Cour d’appel du Québec, dans une saga qui s’étire depuis des années.

Les avocats de la municipalité se sont battus bec et ongles pour ne pas que ces travaux soient ordonnés, au point où la justice a condamné la Ville à des milliers de dollars en pénalité pour procédures abusives.

Le ruisseau Meadowbrook, qui passe sur le terrain de golf éponyme, constitue un rare segment de cours d’eau non canalisé dans l’île de Montréal. Il constitue le dernier vestige visible de la rivière Saint-Pierre, qui coulait du mont Royal jusqu’au Saint-Laurent avant d’être presque totalement canalisée au XIXe siècle.

Son air champêtre cache toutefois une triste réalité : depuis au moins une vingtaine d’années, il est très fortement pollué, au point où les golfeurs se voient découragés d’y plonger la main pour récupérer leur balle.

« L’égout pluvial de la Ville, qu’on retrouve en amont du ruisseau, est contaminé, a décrit la justice. La présence de coliformes fécaux et autres contaminants provient du déversement d’eaux usées résultant de raccordements de plomberie inversés dont certains sur le territoire des villes de Côte-Saint-Luc et Montréal-Ouest, dont les eaux de surface sont recueillies par l’égout pluvial de la Ville. » Un raccordement inversé survient lorsqu’un bâtiment rejette ses eaux usées dans l’égout pluvial plutôt que dans l’égout sanitaire.

Défaite de Montréal

Le golf Meadowbrook demandait à la Cour d’appel d’obliger Montréal à cesser sa contamination et à nettoyer le ruisseau. La Ville de Montréal plaidait que l’enjeu était complexe, que des travaux exigeraient des permis provinciaux et que la justice devait s’abstenir de rendre une telle ordonnance. Ses avocats soulignaient notamment que, comme la contamination de son égout pluvial provenait de mauvais raccordements sur les territoires de Côte-Saint-Luc et de Montréal-Ouest (des villes défusionnées), ces municipalités devraient être tenues responsables.

Après un jugement de la Cour supérieure en 2018, la Cour d’appel s’est prononcée dans un jugement rendu jeudi.

Montréal doit « mettre fin à tout déversement dans le ruisseau Meadowbrook à partir de l’égout pluvial qui s’y déverse, par canalisation, déviation ou autre mesure nécessaire afin d’y faire cesser ces déversements, d’exécuter et de terminer ces travaux dans un délai maximal de 18 mois », ont décidé les juges Yves-Marie Morissette, Geneviève Marcotte et Lucie Fournier.

La Ville devra aussi « nettoyer les abords du ruisseau Meadowbrook sur le terrain de la demanderesse afin d’en retirer toute trace de coliformes fécaux, de phosphore et d’azote ammoniacal dans un délai maximal de 24 mois ».

Montréal a été condamné à verser 27 000 $ à Golf Meadowbrook pour avoir lancé des procédures abusives devant la justice.

La Ville de Montréal et Golf Meadowbrook n’ont pas commenté le dossier.

Jeudi, La Presse rapportait qu’un autre ruisseau non canalisé de l’ouest de Montréal, le ruisseau Bouchard, avait été pollué par des milliers de litres de pétrole, début janvier. Un travailleur qui livrait du carburant sur un terrain adjacent au ruisseau a commis une erreur de manipulation qui a mené au déversement.