Officiellement, les soupers entre amis semblent plus dangereux que le métro, où la Santé publique montréalaise assure qu’il n’y a pas eu d’éclosions. L’importance relative de la transmission par aérosols et la difficulté de retracer l’origine des cas suscitent tout de même des questions.

Au début du mois de mars, la Santé publique a lancé un appel à tous pour retrouver la quatrième personne atteinte de la COVID-19 au Québec, qui était passée par les stations Berri-UQAM et Champ-de-Mars. Cela n’a rassuré personne. Selon la Société de transport de Montréal (STM), au plus fort de la crise –, mais aussi en plein confinement alors qu’on n’avait plus nulle part où aller – les baisses de fréquentation du métro ont atteint 92 %, et 83 % dans les autobus.

(À l’heure actuelle, on en est à une baisse de 66 % dans le métro et de 54 % dans les autobus.)

À ce jour que ce soit à Paris, à Tokyo, à Pékin (Beijing), à Berlin, à New York ou à Montréal, les transports publics n’apparaissent pas comme des vecteurs importants de transmission de la COVID-19.

N’empêche, selon le New York Times, la Ville et l’État de New York ont admis ne pas savoir avec certitude dans quelle mesure les transports en commun, en mars et en avril, ont pu contribuer à l’explosion de cas dans la Grosse Pomme.

Car là-bas comme ici, le traçage des cas contacts demeure une science inexacte.

Selon une étude du chercheur Maogui Hu et ses collaborateurs (Risk of Coronovirus Disease 2019 Transmission in Train Passengers) publiée à la fin juillet dans Oxford Academic et portant sur les passagers de trains, « le risque de transmission de la COVID-19 dans les trains est élevé, mais ce risque fluctue grandement en fonction de la durée du trajet et de l’endroit où l’on est assis par rapport à une personne infectée ».

Ainsi, les passagers situés dans la même rangée qu’une personne infectée seraient 10 fois plus vulnérables que ceux qui se trouvent une rangée ou deux rangées plus loin.

La ventilation, le nerf de la guerre

Au cœur des inquiétudes dans les transports en commun : la ventilation. S’il y en a trop peu – comme sur le navire de croisière Diamond Princess –, cela peut être problématique, comme l’a relevé une analyse de cas menée par Almilaji et Thomas (2020).

À l’inverse, dans les CHSLD l’été dernier, on a craint que les ventilateurs puissent propager le virus. Ne faut-il pas craindre aussi ces grands courants d’air dans le métro ?

À l’heure actuelle, comme cela a été recommandé dans les écoles, une très bonne ventilation est préconisée, ce qui est le cas dans le métro de Montréal.

Michel Théorêt, directeur de l’ingénierie à la STM

La ventilation mécanique du métro de Montréal est assurée par des puits de ventilation.

En gros, l’air de l’extérieur est transporté par les puits dans les tunnels et dans les voitures. Cet air sort ensuite par les côtés des voitures « et à chaque station, beaucoup d’air sort par les portes », relève M. Théorêt.

La suspension pneumatique du métro permet aussi au système de ventilation de s’ajuster : quand davantage de personnes voyagent et que leur poids se fait sentir sur la suspension pneumatique, la ventilation s’ajuste automatiquement à la hausse.

Autre avantage du métro : il n’est pas climatisé, ce qui évite qu’un flux d’air soit dirigé vers les usagers et les contamine.

Que ce soit au restaurant ou dans le métro, des chercheurs interrogés par le New York Times ont estimé que prendre le métro était probablement plus risqué que marcher dehors, mais plus sécuritaire que le fait de partager un repas entre amis à l’intérieur.

La Dre Anne Gatignol, qui est professeure en microbiologie à l’Université McGill et qui fait actuellement une étude sur la COVID-19, pense pour sa part « que si tout le monde porte un masque, le métro est probablement sécuritaire ».

Le fait que les gens effectuent en général de courts trajets en transports en commun (risquant d’être moins longtemps en contact avec une personne qui serait infectée) et que les usagers restent silencieux la plupart du temps semble éviter la transmission des gouttelettes.

La grande inconnue : les aérosols

Il y a quelques jours, les Centres pour le contrôle des maladies (CDC) américains (l’équivalent de Santé Canada) ont publié puis retiré rapidement une note voulant que la COVID-19 se transmette de façon importante par voie aérienne – les fameux aérosols – alors que les gouttelettes sont plus largement mises en cause depuis le début.

Dans son document intitulé « Covid-19 : Environnement intérieur » datant de juillet 2020, l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) signale de son côté que « selon les données scientifiques actuelles, les experts ne peuvent exclure une possible transmission par voie aérienne (fines sécrétions respiratoires infectées) ».

Tout comme l’INSPQ, l’Agence de la santé publique du Canada (ACSP) estime qu’une ventilation efficace doit être mise en place en complémentarité avec les mesures de distanciation physique.

Michel Théorêt, directeur de l’ingénierie à la Société de transport de Montréal (STM), souligne aussi qu’à son avis, une ventilation adéquate conjuguée au port du masque et à une bonne distanciation physique limite grandement les risques.

Malgré les baisses de fréquentation, la STM maintient son offre de service à 95 % depuis le début de la pandémie, et ce, « encore aujourd’hui, sur ses réseaux bus et métro justement afin que les clients puissent maintenir le plus possible une certaine distanciation physique », précise Alain Legault, directeur des communications à la STM.

Outre la distribution gratuite de masques, 300 distributeurs de gel ont été installés dans les stations de métro et il y a « nettoyage sur une base quasi quotidienne des surfaces les plus touchées », ajoute-t-il.