Les écuries qui abritent les chevaux de calèches maintenant interdites dans le Vieux-Montréal feront place à un énième projet de condos dans Griffintown.

Le terrain loué depuis 27 ans par Luc Desparois, des Services de calèches et traîneaux Lucky Luc, a été vendu en mai dernier. « Je ne sais pas si vous avez une idée comment ç’a frappé. J’en ai eu les shakes. C’est le chez-nous de mes chevaux », a-t-il affirmé à La Presse.

Les Investissements 1810 Basin inc. (le nom correspond à l’adresse) sont les nouveaux propriétaires de ce terrain situé non loin du canal de Lachine et pour lequel ils ont payé 20 millions de dollars. L’un des actionnaires de la société est le promoteur et constructeur Omnia Technologies, qui dirige plusieurs autres chantiers résidentiels à Montréal, dont les trois phases du projet Centra. Sur le web, Omnia indique avoir construit plus de 2000 unités d’habitation. La société Claridge de la famille Bronfman agit comme investisseur dans le projet de la rue des Bassins.

Le terrain a changé de main, mais les écuries sont encore nos locataires. Mais en tant que promoteurs et développeurs, nous avons l’intention de faire un projet sur ce terrain. C’est assez embryonnaire.

Jean-François Beaulieu, l’un des dirigeants d’Omnia

Pas encore de plans détaillés

Depuis juin dernier, des discussions ont été entamées avec la Ville pour établir notamment la hauteur et les volumes du bâtiment à construire. À cette étape-ci, il n’y a pas encore de plans détaillés, mais « il faut déterminer ce qui est acceptable et quel est le meilleur projet » en regard du développement prévu dans le secteur par la Ville, explique M. Beaulieu.

Ce dernier souligne que le projet comportera des condos pour les familles et des condos abordables. La superficie moyenne prévue est de 700 pieds carrés.

Jean-François Beaulieu ajoute que l’emplacement du terrain à proximité de l’eau est pris en considération. La volonté d’Omnia est « d’avoir un niveau d’implantation au sol le plus petit possible pour laisser de l’espace vert à tout le monde, puisque cela donne accès à un parc », dit-il. Les détails du projet devraient être connus d’ici à la fin de l’année. Au même moment, les écuries devront céder l’espace aux excavatrices et aux grues.

Pour M. Desparois, qui préside également l’Association des hommes et femmes à chevaux de Montréal, le changement de vocation de ce terrain n’est qu’une autre étape d’un mouvement qui met à mal l’industrie, et ce, « même si les nouveaux propriétaires sont très gentils ».

PHOTO GRAHAM HUGHES, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Luc Desparois, président de l’Association des hommes et femmes à chevaux de Montréal

On se fait engloutir par la Ville et le développement. Pis, y a plus de place pour les chevaux.

Luc Desparois

Lorsque l’industrie était florissante, une soixantaine de chevaux logeaient dans les écuries. Maintenant, on en compte seulement huit. « Tout autour de moi, c’est des gratte-ciel. Et la Ville a tout fait au cours des dernières années pour que je décolle de là. C’est sûr que le règlement de la Ville a pesé dans la balance », croit-il.

La Ville de Montréal a adopté un règlement interdisant les calèches dans le Vieux-Montréal à l’été 2018. Le règlement s’applique depuis le 1er janvier. Les cochers en contestent toutefois la légitimité devant les tribunaux. La cause pourrait être entendue au printemps, estime M. Desparois. Les cochers ont essuyé un revers en décembre dernier lorsque la cour a rejeté leur demande d’injonction pour suspendre l’application du nouveau règlement. « La Ville met fin à une industrie qui est là depuis plus de 300 ans, mais le débat n’a pas encore été fait », souligne-t-il.