(Montréal) La rue Amherst, à Montréal, portera désormais le nom Atateken.

Des élus municipaux et des dirigeants autochtones ont annoncé vendredi qu’ils effaceront ainsi la trace du général britannique qui avait ouvertement exprimé sa volonté d’éradiquer des populations autochtones et prôné le recours à des couvertures contaminées à la variole pour réprimer leurs soulèvements.

Lors de la cérémonie confirmant le changement de nom, à l’occasion de la Journée nationale des peuples autochtones, la mairesse de la ville, Valérie Plante, a expliqué que le mot Atateken, en langue mohawk, signifie « frères et sœurs » et porte en lui la notion de relations et d’égalité entre les personnes. À son avis, le geste de remplacer un toponyme critiqué depuis de nombreuses années par un nom rassembleur qui invite à la paix et au partage entre les cultures autochtones et allochtones incarne bien l’esprit de Montréal dans son programme de réconciliation.

Pour sa part, le chef de l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador, Ghislain Picard, a estimé que Montréal pose un geste qui confirme son engagement pour le respect, la reconnaissance et la fraternité. Le changement de toponymie tourne selon lui une autre page de l’histoire commune.

« Aujourd’hui, nous retirons le général Jeffery Amherst de notre passé — nous effaçons cette partie de notre passé, du nôtre et du vôtre —, mais nous n’oublierons pas, a-t-il avancé. Maintenant que la rue Amherst a un nouveau nom, l’esprit de nos peuples, l’esprit de nos ancêtres peut reposer en paix. »

L’ancien toponyme Amherst faisait référence au général de l’armée britannique Jeffery Amherst qui a dirigé la conquête de Montréal en 1760. Jusqu’en 1763, il a organisé des expéditions contre des colonies françaises aux Antilles et à Terre-Neuve. Il a aussi envoyé des effectifs à Detroit pour mater le soulèvement autochtone de Pontiac en 1763.

Il a donné son nom à divers endroits à travers le continent, tels que les villes de Amherst, en Nouvelle-Écosse, et de Amherstburg, en Ontario.

En septembre 2017, l’ancien maire Denis Coderre avait annoncé que la Ville de Montréal abolirait éventuellement le nom d’Amherst qui désigne depuis plus de 200 ans la rue aménagée du nord au sud entre la rue Sherbrooke Est, face au parc La Fontaine, et la rue Notre-Dame Est.

Cinq membres du comité de toponymie autochtone ont permis à la Ville de Montréal de désigner le nouveau nom de la rue.

« Bien que nous ne pouvons pas effacer l’histoire et que nous ne devrions pas souhaiter le faire, le retrait de son nom montre la volonté de Montréal de travailler ensemble », a relevé Hilda Nicholas, membre de ce comité et directrice du Centre culturel et de langue de Kanesatake.

« Ce n’est pas qu’un changement de nom de rue, c’est un changement de paradigme », a renchéri le grand chef de Kanesatake, Serge Simon.

Le changement de toponyme annoncé vendredi sera entériné par le conseil municipal à la fin de l’été. Ensuite, pour faciliter le repérage des citoyens, les deux plaques toponymiques Amherst et Atateken cohabiteront pendant plusieurs semaines.

Marie-Ève Bordeleau, la commissaire aux Affaires autochtones de Montréal, explique que divers experts, groupes et communautés autochtones ont été consultés dans le cadre de ce processus et qu’une banque de noms sera créée pour utilisation ultérieure.

« Nous avons l’intention de changer d’autres noms d’endroits », a-t-elle laissé savoir.