Après des mois de tensions, la Ville de Mirabel a décidé la semaine dernière de retirer la totalité de son financement de 650 000 $ à l’Association des maisons des jeunes de Mirabel, ce qui a plongé dans l’incertitude une quarantaine d’employés.

Conflits, mauvaise gestion, faible fréquentation, intimidation et forte résistance au changement : voilà les arguments que la Ville de Mirabel a invoqués pour mettre fin lundi dernier à un partenariat de 25 ans avec l’organisme à but non lucratif (OBNL), qui compte six maisons des jeunes à Mirabel, deux travailleurs de rue et une coopérative d’aide à l’emploi.

Désormais privée de 65 % de son budget annuel, qui s’élève à près d’un million, l’Association des maisons des jeunes doit aussi quitter les sept locaux de la municipalité qu’elle occupe dès la rentrée.

Une pétition mise en ligne mardi par des jeunes a recueilli plus de 3000 signatures. « Nous sommes contre la fermeture de ce service très important pour nous », peut-on lire dans un message diffusé sur Facebook.

« Je trouve ça plate pour ceux qu’on accompagne », explique Martine Collin, l’une des deux seules travailleuses de rue de Mirabel. « On crée un lien de confiance avec les personnes qui ne sont pas rejointes autrement par les ressources. »

La Ville est en train d’abandonner ses jeunes.

Audrey, intervenante dans une maison des jeunes à Mirabel

climat « malsain » au C.A.

Dénonçant une « mauvaise gestion des fonds », la Ville avait mis l’Association sous tutelle en juillet dernier dans le but de redresser la situation. « Malheureusement, au bout d’un an, on a conclu que ce n’est pas si facile avec le personnel en place. Il y a de la résistance », a expliqué le maire, Jean Bouchard. La Ville a préféré repartir à zéro en mettant fin au mandat de l’Association.

L’état des finances de l’Association est en règle, selon Chantal Maillé, présidente du conseil centrale des Laurentides à la CSN, qui représente les employés. « Notre conseiller au dossier a regardé les comptes, et tout est en ordre. Il n’y a pas lieu de s’inquiéter », dit Mme Maillé.

La relation entre la Ville et l’Association s’est progressivement envenimée depuis un an, et toutes les parties s’entendent sur le climat « malsain » qui règne au conseil d’administration de l’OBNL.

Le maire dénonce par exemple des tentatives d’« intimidation » contre Steve Charbonneau, ancien président du conseil d’administration, aussi conseiller municipal. « Ç’a été jusqu’à des menaces de mort […] de la part d’individus qu’on a pu demander à la police de retrouver. Ce sont des gens qui étaient reliés d’une quelconque façon à l’Association. Il y a eu suffisamment de preuves pour demander à la personne en question de cesser ses intimidations [contre M. Charbonneau] », explique l’élu. M. Charbonneau confirme les propos du maire.

Sur les sept membres du conseil d’administration, quatre sont des conseillers municipaux.

Départs multiples

Au cours des dernières années, de nombreux membres du conseil d’administration ont remis leur démission. Seulement pour l’année 2017-2018, quatre présidents se sont succédé au conseil.

En janvier 2018, Jérôme Côté, secrétaire depuis sept mois, a démissionné du conseil d’administration en dénonçant l’ingérence de la municipalité. « L’Association n’est pas la propriété de la Ville de Mirabel. Il y avait beaucoup d’incompréhension de ce qu’est une organisation autonome, un OBNL », rapporte celui qui s’implique depuis plusieurs années dans le milieu communautaire.

« Le C.A. fait de la microgestion. Ils disent par exemple : “Le frigo est sale.” Ce n’est pas ça, son rôle », dénonce Annie Durette, ancienne directrice générale de l’Association. Après 20 ans d’implication dans l’Association, elle a démissionné en juin 2018.

Le nombre de jeunes qui fréquentent régulièrement les établissements est un autre sujet de discorde entre la Ville et l’OBNL. Mirabel estime qu’ils sont une soixantaine et l’Association, 600.

La municipalité compte redistribuer les 650 000 $ en services aux jeunes, mais sous d’autres formes, selon le maire. « Il n’est pas question de baisser les bras. Les sommes vont être maintenues pour offrir différents services », explique M. Bouchard. Il devait rencontrer vendredi les jeunes afin de leur présenter ses idées pour l’avenir.