Le nouveau chef du SPVM, Sylvain Caron, souhaite que la police de Montréal, qui vient de traverser l'une des pires crises de son histoire, redevienne « le corps de police de référence qu'il a été ». L'atteinte de cet objectif passera notamment par des réaffectations d'effectifs qui permettront d'offrir un service de meilleure qualité aux citoyens, croit-il. Extraits d'entrevue.

Sur l'affaire Gilbert Rozon

«  Les enquêteurs ont fait un excellent travail, mais la suite appartient à la justice », répond M. Caron quand on lui demande de réagir au fait que seule une accusatrice de Gilbert Rozon sur 14 a vu sa plainte retenue par le Directeur des poursuites criminelles et pénales. 

Sans pouvoir préciser lesquels, il croit que des changements législatifs devraient être apportés pour faciliter la corroboration des versions et porter des accusations en matière d'agression sexuelle. Il ne sait pas si la solution passe par la création d'un tribunal spécial, comme le propose le PQ.

« Il doit y avoir une réflexion avec tous les intervenants, police, centres d'aide aux victimes, ministère de la Justice, etc., pour améliorer le processus, car on ne peut pas continuer avec le statu quo », dit-il.  

Plus d'enquêteurs 

Une chose est sûre, le SPVM entend adopter une solution concrète en matière d'agressions sexuelles dès le début de la nouvelle année.

Une des premières constatations faites par M. Caron, lorsqu'il est arrivé au SPVM en mars dernier, c'est le nombre de plaintes à la Section des agressions sexuelles. 

Il affirme qu'en janvier, des effectifs seront ajoutés, sans en préciser l'ampleur. Selon nos informations, on pourrait s'attendre à ce qu'ils soient au moins une dizaine de plus aux Agressions sexuelles et au module chargé de lutter contre l'exploitation sexuelle des enfants.

« Cela va redonner une certaine robustesse à la Section des agressions sexuelles, car il y a beaucoup de volume à traiter », explique M. Caron. 

D'autres fusions de PDQ possibles 

Au début de 2019, le poste de quartier 24, qui couvre Outremont et Mont-Royal, sera fermé pour que ses policiers soient réaffectés au poste 26 du secteur Côte-des-Neiges. M. Caron n'exclut pas d'autres fusions ou fermetures de postes dans les mois ou années à venir.

« Est-ce que c'est nécessaire d'avoir autant de postes de quartier, comme c'est le cas actuellement ? C'est une réflexion qu'il faut faire. Est-ce que les fondements de la police de quartier devraient être vus différemment ? Ce n'est pas la bâtisse qui fait que l'on est en sécurité ou pas. Ce sont nos plans de déploiement, de patrouille et d'intervention. Est-ce qu'il y aura d'autres fusions de PDQ ? Peut-être. L'idée, c'est d'être optimal et d'avoir le maximum de personnes aux bons endroits », affirme M. Caron. 

Les stupéfiants regroupés sous un même toit 

Alors que les anciennes sections Stupéfiants ont été fondues parmi d'autres sections par l'ancienne administration Pichet, Sylvain Caron veut leur redonner leurs lettres de noblesse. Le chef annoncera en début d'année que toutes les enquêtes et sections antidrogues seront regroupées sous un même toit et seront supervisées par une seule personne au SPVM.

Ces changements seront faits dans une optique de lutte contre le crime organisé, mais également pour répondre directement aux plaintes des citoyens.

« Dans notre lutte contre les drogues, on s'est beaucoup préoccupés de certains niveaux, mais on a peut-être délaissé la rue. Et la rue, c'est le sentiment de sécurité et le sentiment de sécurité. C'est important pour moi. Ce sera pour se repositionner et revenir à la base », explique le nouveau chef du SPVM. 

Un mariage « inadmissible »

Parlant de crime organisé, M. Caron qualifie d'« inadmissible » le fait qu'un Hells Angel a pu se marier dans un hôtel somptueux du centre-ville de Montréal, entouré de 250 personnes, dont des membres de l'organisation criminelle.

« Ce ne sont pas des idoles, ces gens-là, ce sont des individus criminels. Il faut renforcer les lois », dit-il. 

M. Caron est conscient que les Hells Angels ne s'affichaient pas et ne faisaient rien d'illégal. Il se demande toutefois si le Canada ne devrait pas adopter des lois comme en Italie, par exemple, qui donneraient à la police plus de pouvoirs contre les organisations criminelles. « Le Code criminel actuel ne nous permet pas d'intervenir s'il n'y a pas d'infraction criminelle. Mais il faut faire attention de ne pas se retrouver avec un État policier », prévient-il.

Mandat à durée variable

Officiellement, le mandat de M. Caron est de cinq ans. Mais le policier, qui compte 37 ans d'expérience, n'exclut pas de rester moins longtemps ou, au contraire, de demander un second mandat.

« Mon mandat, c'est de continuer ce que M. Prud'homme a commencé. Ce que je souhaite, c'est que le prochain directeur ou la prochaine directrice soit quelqu'un de l'interne. À 4500 policiers, il faut que ce soit quelqu'un de l'interne. Lorsque je sentirai que la relève sera prête, je le dirai aux autorités et ils lanceront le processus. » 

« Ce qui est arrivé dans le passé est arrivé. Maintenant, on regarde en avant. Je veux être la personne qui va faire en sorte que le SPVM va donner le service qu'il faut aux citoyens de Montréal. La mobilisation des troupes est également importante. Le SPVM redeviendra l'organisation policière de référence au Canada, comme elle l'a été. Je ne ferai pas ça tout seul », conclut-il. 

Pour joindre Daniel Renaud, composez le 514 285-7000, poste 4918, écrivez à drenaud@lapresse.ca ou écrivez à l'adresse postale de La Presse.

Photo Olivier PontBriand, La Presse

Sylvain Caron (à gauche) lors de son assermentation, en présence de la mairesse Valérie Plante, Martin Prud'homme, précédent chef intérimaire du SPVM, et Ian Lafrenière (à droite), adjoint parlementaire de la ministre de la Sécurité publique