Qu'ont en commun un amateur de hockey frappé par une rondelle, une maison inondée à répétition et une personne incarcérée par erreur? Ils font partie des centaines de demandes de dédommagement formulées à la Ville de Montréal depuis 2011. La métropole a dû verser pas moins de 82 millions depuis sept ans en règlements à l'amiable, révèle un document obtenu en vertu de la Loi sur l'accès à l'information.

La Presse a obtenu une liste de la totalité des règlements à l'amiable de la Ville de Montréal depuis 2011. Celle-ci révèle que la métropole a reçu depuis sept ans pas moins de 1860 réclamations, pour un total de 284 millions, qui se sont réglées par une entente à l'amiable.

Dans certains cas, la métropole a refusé de payer ou a versé beaucoup moins que demandé, si bien que la facture totale des règlements à l'amiable s'est élevée à 82 millions.

Fréquentes inondations

Les inondations représentent de loin la principale cause de réclamations formulées à la Ville de Montréal. Depuis sept ans, la métropole a reçu près de 600 demandes pour des dommages causés par des refoulements ou des ruptures de conduites, pour un total de 34 millions. La Ville a accepté de verser environ la moitié de cette somme, soit 17,7 millions.

La majorité des demandes a été présentée par des compagnies d'assurances, qui cherchent à récupérer des indemnités versées. Le paiement le plus important a d'ailleurs été versé à un assureur, en 2013. L'entreprise réclamait 282 000 $ pour une maison inondée à la suite de la rupture d'une conduite d'eau, mais a reçu 240 000 $.

C'était la deuxième fois en peu de temps que Montréal devait verser un dédommagement pour ce bâtiment de Rivière-des-Prairies. L'assureur avait reçu 105 000 $ pour une autre rupture de conduite survenue au même endroit deux ans plus tôt.

Les chutes sur les trottoirs coûtent cher

Le mauvais état des trottoirs et leur manque d'entretien en hiver ont coûté 1,8 million à Montréal depuis 2011. Pas moins de 133 personnes ont présenté des réclamations après s'être blessées en faisant une chute.

En novembre 2017, Montréal a ainsi offert 54 500 $ à une personne qui réclamait 185 000 $ après s'être blessée en glissant au centre-ville. En mars dernier, la Ville a accepté de verser 9400 $ à une personne qui a été blessée après s'être pris les pieds dans un couvercle d'égout qui dépassait d'un trottoir.

Un cycliste a quant à lui eu droit à 44 000 $ en 2012 après avoir fait une chute en frappant «deux nids-de-poule successifs» dans la rue Clark, sur le Plateau Mont-Royal.

Une rondelle à 4000 $

Au-delà de ses trottoirs, Montréal a dû dédommager une vingtaine de personnes victimes d'accidents en raison de défauts aux installations de la Ville.

En mars dernier, la Ville a ainsi accepté de verser 4000 $ à une personne blessée après avoir été frappée par une rondelle à l'aréna Rolland, à Montréal-Nord. Celle-ci avait réussi à traverser un filet de sécurité avant de heurter le spectateur.

Les chutes de branches d'arbres peuvent aussi mener à des réclamations. En 2016, Montréal a ainsi versé 18 000 $ aux parents d'un bambin d'à peine 7 mois blessé par la chute de deux branches. L'arbre appartenait à la Ville; l'incident s'était produit au parc-nature de l'Île-de-la-Visitation.

Deux familles endeuillées

La liste des règlements à l'amiable permet de constater que les familles de deux personnes mortes ont obtenu un dédommagement. Montréal a versé en 2012 une somme de 40 000 $ aux proches d'un enfant de 7 ans mort en tombant d'un tremplin, en 2005.

En 2013, Montréal a aussi offert 25 000 $ à la famille d'un homme mort après s'être électrocuté sept ans plus tôt. Ses proches blâmaient le Service de sécurité incendie pour avoir mal sécurisé les lieux après un brasier. L'homme s'est électrocuté en touchant un fil électrique sectionné qui avait été laissé en place.

Voitures endommagées

Une centaine de personnes ont également présenté une réclamation pour des dommages à leur voiture. En mars dernier, Montréal a dû verser 3000 $ au propriétaire d'une voiture aspergée de peinture blanche alors que la Ville était à refaire le marquage d'une rue dans l'arrondissement du Sud-Ouest. Tout comme pour les inondations, les compagnies d'assurances formulent le gros de ces réclamations.

À noter, la Ville est toutefois peu encline à payer pour des dommages causés par des nids-de-poule. Elle a ainsi versé à peine 14 500 $ à des propriétaires de voitures endommagées par ces trous dans la chaussée.

Arrestations abusives

Plus d'une vingtaine de personnes ont réclamé un dédommagement à la Ville de Montréal après avoir été victimes d'une arrestation jugée abusive. La métropole a ainsi accepté de verser 155 000 $ à un jeune homme qui réclamait 1,4 million après avoir été la cible de fausses accusations en 2004. Les deux agents avaient été suspendus dans cette affaire.

La majorité des cas se règlent plus rapidement et pour moins. Ainsi, en juin 2017, Montréal a accepté de verser 6000 $ à un Montréalais arrêté et détenu à la suite d'une erreur sur la personne.

Le profilage racial a également mené Montréal à verser 45 000 $ à six personnes qui estimaient avoir été victimes de racisme. La majorité d'entre elles se plaignaient d'avoir reçu un constat d'infraction en raison de leur origine ethnique.

Diffamation

Une personne a obtenu 70 000 $ en juin dernier après avoir menacé de poursuivre Montréal en diffamation. Le plaignant, dont le nom a été caviardé, demandait 220 000 $ à la suite de la publication d'articles en 2014 dans «divers médias de Québecor». Celui-ci soupçonnait le Service de police de la Ville de Montréal d'avoir été la source d'information derrière ces reportages et avançait que sa réputation avait été entachée.

- Avec la collaboration de William Leclerc, La Presse