Le tuteur nommé pour faire le ménage au Syndicat des cols bleus regroupés de Montréal a gardé en poste un représentant syndical qui avait reçu l'ordre des tribunaux de ne pas s'en prendre à un de ses collègues.

Le tuteur Denis Régimbald, du Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP), qui chapeaute les cols bleus (local 301), a confirmé hier à La Presse que Martin Forest avait été brièvement suspendu, puis réintégré. « Martin Forest a été suspendu aussitôt que les allégations m'ont été rapportées. Il est demeuré suspendu pendant cinq semaines », a indiqué par courriel Denis Régimbald.

Ce dernier n'a pas expliqué les raisons du retour de M. Forest dans ses fonctions syndicales alors qu'il a admis devant un juge de paix, le 20 février dernier, qu'un collègue avait des raisons de craindre qu'il lui « cause des lésions personnelles [...] ou endommage sa propriété ».

De plus, M. Régimbald a ignoré la question de La Presse quant à la possible implication du directeur québécois du SCFP, Marc Ranger, dans la décision de réintégrer M. Forest.

Denis Régimbald n'était pas disponible hier pour une entrevue. Il était occupé à préparer l'assemblée générale qui se déroule ce matin, expliquait-on au SCFP. Les cols bleus seront appelés à se prononcer sur les statuts et règlements de leur syndicat revus par l'équipe de la tutelle.

Selon l'engagement signé par Martin Forest - communément appelé un « 810 » parce que cela correspond à l'article 810 du Code criminel -, il ne peut pas troubler l'ordre public et il doit avoir une bonne conduite pendant six mois. En outre, il ne peut communiquer directement ou indirectement avec sa victime, Marc-André Bondu ; les deux hommes sont toutefois convoqués à la même assemblée syndicale.

CRIS ET MENACES

Les gestes reprochés à M. Forest à l'égard de M. Bondu remontent à il y a un an, quelques semaines avant la mise en tutelle du syndicat des cols bleus. Il y a eu une escalade au cours des semaines suivantes jusqu'à ce que Marc-André Bondu dépose une plainte à la police parce qu'il avait peur pour sa sécurité personnelle. L'enquête a mené au « 810 ».

M. Forest a gardé ses fonctions au local 301 alors que M. Bondu s'est retrouvé, lui, en arrêt de travail ; à ce jour, il n'a pas récupéré ses responsabilités syndicales. Denis Régimbald affirme que la réintégration de Martin Forest ne s'est jamais faite « au détriment de la réintégration de Marc-André Bondu ». « Justement, je travaillais sur sa réintégration quand seulement quelques jours plus tard, Marc-André Bondu a demandé l'intervention de la CNESST ce qui a mis fin à tous nos travaux et nous avons déjà convenu d'une date pour une audition à la CNESST », a indiqué M. Régimbald.

La Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) a décidé, une semaine après le « 810 » de M. Forest, de reconnaître que M. Bondu avait subi une lésion professionnelle. Dans la décision que La Presse a obtenue, la CNESST souligne le caractère traumatisant des « menaces verbales et de[s] conduites d'intimidation » subies par M. Bondu.