Philippe Pichet n'a pas pris les mesures appropriées pour assainir le SPVM alors qu'il dirigeait le corps policier, conclut le rapport préliminaire de Martin Prud'homme obtenu par La Presse. La Ville de Montréal devra trancher d'ici peu sur l'avenir de son chef de police suspendu depuis décembre.

Six mois après avoir pris la barre du SPVM, le chef intérimaire nommé par Québec, Martin Prud'homme, vient de remettre un rapport préliminaire au ministre des Affaires municipales et de la Sécurité publique, Martin Coiteux. Le document de 48 pages obtenu par La Presse détaille les lacunes dans la gestion par son prédécesseur, suspendu depuis décembre.

«Malgré la connaissance des problématiques liées à la division des affaires internes, peu de changements d'importance avaient été faits pour régulariser la situation et assurer une saine gestion de cette unité», peut-on lire.

Martin Prud'homme déplore également l'absence d'action pour améliorer le climat de travail au sein du corps policier alors que le problème avait été clairement identifié. «Ce retard à prendre concrètement la situation en main a laissé des traces dans l'organisation», estime-t-il. Il faudra du temps pour rétablir la situation, ajoute-t-il.

Signe du climat malsain qui régnait au SPVM, Martin Prud'homme dit avoir reçu dans une boîte courriel sécurisée pas moins de 275 messages et suggestions. Le rapport note qu'une initiative similaire avait été lancée sous Philippe Pichet, mais qu'un seul message avait été reçu en trois mois. «Pour nous, cette boîte est en quelque sorte un baromètre qui nous permet d'évaluer le niveau de confiance des membres envers l'actuelle administration», peut-on lire.

Ces messages reflètent aussi le manque de confiance envers l'ancienne direction. De nombreuses personnes ont manifesté leur crainte de représailles et plusieurs ont demandé à «être rencontrés à l'extérieur du quartier général de peur d'être reconnus».

«Le degré de confiance envers l'ancienne direction nous est apparu préoccupant», note le rapport.

Le rapport reconnaît que des mesures ont été prises en 2017, mais que celles-ci ont échoué à rassurer les Montréalais sur la gestion de leur corps de police.

Au cabinet du ministre de la Sécurité publique Martin Coiteux, on souligne que ce dernier veut en avoir fini avec ce dossier avant la fin de son mandat. 

L'avenir de Philippe Pichet se trouve désormais entre les mains de la Ville de Montréal et du gouvernement. On confirme que le ministre a eu «des échanges» avec la Ville de Montréal dans ce dossier au cours des derniers jours. M. Pichet est un employé de la Ville insiste-t-on à Québec, même si le choix d'un directeur du SPVM doit être approuvé par le gouvernement.

Le ministre Coiteux va demander l'avis de la Ville de Montréal, puisqu'«il ne peut unilatéralement décider de l'avenir de M. Pichet». La loi prévoit que la Ville de Montréal doit revenir à Québec avec l'avis de la Commission de sécurité publique et du conseil municipal. On n'attend pas un retour de la ville cette semaine toutefois.

Comité de discipline à revoir

Dans son rapport, le chef intérimaire manifeste aussi des préoccupations sur le règlement de discipline interne. S'il a été modifié en septembre 2015, les changements lui paraissent «assez superficiels». En fait, M. Prud'homme estime que «la procédure disciplinaire n'a pas fait l'objet d'une révision en profondeur depuis 1990».

Il propose deux solutions. D'abord, il souhaite mettre en place un mécanisme de conciliation pour tenter de trouver des solutions. Ensuite, il suggère de revoir la composition du comité de discipline pour permettre d'intégrer des membres de l'externe du SPVM, ce qui est interdit présentement.

En attendant ce changement, M. Prud'homme a indiqué qu'il entendait se prévaloir de son pouvoir de révision dans toutes les affaires concernant les cadres policiers et au besoin pour les policiers syndiqués. Il compte ainsi se faire accompagner de conseillers-experts pour rendre une décision finale.