Ils ont d'abord été échaudés par cet hiver 2018 éprouvant, au cours duquel leur train de banlieue a accumulé les ratés. Puis, quand le Réseau de transport métropolitain (RTM) leur a annoncé que le service serait interrompu le week-end à compter du 27 avril, et ce, pour des années, certains ont cru que le ciel leur tombait sur la tête. La Presse est allée prendre le bus et le métro avec les orphelins de la ligne de Deux-Montagnes, hier, afin de voir comment ils s'en sortent sans train.

10 h 05

L'immense stationnement incitatif de la gare de Deux-Montagnes, dans la couronne nord, est presque vide. Les seules voitures qui y sont garées appartiennent à des joggeurs qui viennent de s'élancer dans les rues de la ville de banlieue. Cinq personnes attendent l'autobus 400, qui les mènera à la station de métro Montmorency, à Laval, d'où ils pourront se rendre à Montréal. Ils étaient auparavant 4600 à prendre le train de Deux-Montagnes entre le vendredi à 20 h et le lundi matin, période où il n'y a maintenant plus de service pour permettre le début des travaux du Réseau express métropolitain (REM), qui empruntera sa voie ferrée. « C'était plus tranquille qu'en semaine, mais le train de 10 h était presque plein, avant. Il y avait beaucoup de voitures dans le stationnement. Là, c'est vide, je me demandais si j'avais le droit de stationner mon auto. Les gens doivent être plus nombreux à prendre l'auto pour aller en ville maintenant », explique Ashley Jean-Baptiste, qui se rend porter des fleurs à sa maman pour la fête des Mères. L'autobus précédent, une heure plus tôt, avait transporté 11 passagers.

10 h 10

Les cinq passagers montent dans le bus. Direction Laval, via l'autoroute 640, la 13, la 440, puis la 15. Ça roule bien. « Mais ça ne sera pas toujours comme ça. On habite peut-être un coin perdu, mais au printemps avec les cabanes à sucre, l'été le Beach Club et le parc d'Oka, et les pommes l'automne, ces routes sont souvent congestionnées la fin de semaine. Le bus va être pris dans le trafic ! », craint Maryse Lépine, qui va faire de la photo au centre-ville. Gregory Maximov est de Sainte-Marthe-sur-le-Lac et travaille près de la gare Centrale, le terminus du train. C'était parfait pour lui. Rallier le boulot lui prenait parfois moins de 40 minutes. « Mais là, c'est 30 minutes de plus, matin et soir. Ça rallonge pas mal, mais on n'a pas le choix. Il faut travailler », explique-t-il.

10 h 40

Le bus arrive à la station de métro Montmorency. Trente minutes ont déjà passé. En temps normal, ils seraient à quelques minutes de leur destination. « Ça fait sept ans que je prends le train de Deux-Montagnes, je travaille au centre-ville. Mais je suis très insatisfaite depuis janvier. Il y a eu les retards de l'hiver et maintenant ça », déplore Ashley Jean-Baptiste. Malgré tout, elle préfère prendre les transports en commun, même si elle possède un confortable véhicule utilitaire sport. « Le gaz est vraiment très cher. Si les gens commencent à prendre l'auto plutôt que les transports en commun, ça va leur coûter cher, et ça va polluer », ajoute-t-elle. À noter que certaines autres stations sur la ligne de Deux-Montagnes, la plus achalandée du réseau, sont aussi desservies par des navettes pour pallier l'absence de train.

10 h 46

Le métro quitte la station Montmorency, direction Montréal. Frances, elle, descend à la station Vendôme, dans l'ouest de Montréal. Pas le chemin le plus direct. « C'est la première fois que j'essaie ce trajet. Mon mari devait partir tôt avec la voiture, je reviendrai à la maison avec lui », raconte-t-elle, disant avoir eu quelque difficulté à comprendre quel titre de transport elle devait charger sur sa carte pour effectuer ce nouveau trajet. Une difficulté évoquée par plus d'un passager. Mais un employé du RTM au départ de Deux-Montagnes se chargeait de répondre aux questions à ce sujet.

11 h 11

Le métro arrive à la station Bonaventure. Cela a tout de même bien roulé, le calculateur d'itinéraire du RTM annonçait un trajet plus long ; 1 h 12 min. Ashley et Maryse sont descendues en chemin. Frances en a encore pour une bonne dizaine de minutes. Mais tous craignent les prochains mois et années, car les embûches s'additionneront d'ici l'ouverture du REM, pas avant 2024 pour eux. « Ça va être long, ça ne va pas revenir, ça va être un processus difficile », conclut Gregory.

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POURQUOI LA LIGNE DE DEUX-MONTAGNES EST-ELLE FERMÉE LA FIN DE SEMAINE ?

Cette ligne n'est pas près d'être remplacée par le REM. Mais des travaux de forage, d'arpentage et de construction d'aménagements temporaires nécessitent sa fermeture la fin de semaine pour assurer la sécurité des travailleurs.

À QUELLES NOUVELLES RÉDUCTIONS DE SERVICE LES USAGERS DOIVENT-ILS S'ATTENDRE ?

À la fin du mois de juin, trois trains courts en partance ou à destination des gares Roxboro-Pierrefonds et Bois-Franc, deux le matin et un le soir, seront annulés, et les horaires des autres trains seront modifiés. C'est que les travaux dans le secteur de Mont-Royal permettront la circulation sur une seule voie dans le secteur.

À compter de 2020 et pour deux ans, la ligne de Deux-Montagnes n'ira pas plus loin que la gare Du Ruisseau, dans l'arrondissement de Saint-Laurent, en raison des travaux dans le tunnel sous le mont Royal. Une navette conduira les usagers du train vers la station de métro Sauvé, sur la ligne orange.

En 2022, le reste de la ligne, entre Du Ruisseau et Deux-Montagnes, fermera définitivement pour que soient finalisés les travaux qui permettront au REM d'y circuler, possiblement en 2024, a rapporté récemment La Presse.