Le gouvernement Couillard a ramené dans l'actualité une catastrophe environnementale sans précédent au pays en annonçant la construction d'une nouvelle usine afin de traiter les contaminants présents aux lagunes de Mercier, sur la Rive-Sud de Montréal. Devant une salle communautaire bondée de citoyens exaspérés, deux ministres ont promis plus de transparence au sujet des milliers de litres d'huiles et solvants industriels enfouis dans leurs terres durant les années 60.

Il faudra cependant attendre au moins deux ans avant le début des travaux, le temps que le gouvernement prenne les rênes pour caractériser les sols, entreprendre des travaux scientifiques, puis lancer des appels d'offres. Au total, 400 000 mètres3 de sable et de gravier, et 750 000 m3 de roc fracturé ont été contaminés.

Interrogés, plusieurs citoyens ont parlé d'une « honte » environnementale. Certains estiment que le gouvernement aurait dû suivre les recommandations du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement (BAPE), remontant à 1994, d'excaver pour extraire une partie des contaminants.

La mairesse de Mercier, Lise Michaud, a rétorqué que d'autres études ont démontré que l'opération serait trop risquée. Une propriétaire résidentielle, Suzanne Viel, s'explique mal une expertise sous sa maison qui a démontré que le sol est à moitié contaminé. « Pourquoi la moitié ? Il y a plusieurs questions sans réponse dans Mercier », déplore-t-elle.

À l'heure actuelle, il n'existe pas sur le marché une technologie pour éliminer complètement les contaminants, a-t-on précisé au gouvernement. La prochaine usine sera donc une version améliorée de l'actuelle - mise à niveau en 2012 et reprise par le gouvernement cette année-là - en maximisant les opérations de confinement des contaminants.

LES CONTAMINANTS INTERCEPTÉS

Avant d'en dévoiler les détails, des experts du ministère de l'Environnement ont assuré les médias que les derniers tests continuent de révéler la présence de contaminants en deçà de ce qui pourrait être nuisible pour la santé (95 % des contaminants sont interceptés, affirme-t-on). Et la contamination ne progresse plus, assure-t-on.

« C'est l'un des sites les plus contaminés au Canada. Aujourd'hui, on annonce la meilleure solution avec les connaissances scientifiques actuelles. Mais ce n'est pas une solution définitive », a dit Pierre Moreau, ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles.

« Comme on est capable de marcher et de mâcher de la gomme en même temps, on va aussi faire de la recherche scientifique », a poursuivi M. Moreau, qui est aussi député de Châteauguay.

La première étape du projet se déclinera en 2018, avec la réalisation de travaux préparatoires. Afin d'y arriver, le gouvernement compte sur la collaboration de l'Institut national de la recherche scientifique (INRS). En 2019, du forage, des essais de perméabilité des dépôts et du roc ainsi que de l'échantillonnage seront effectués. Selon les échéanciers présentés, la construction sera mise en branle entre 2020 et 2025.

POURSUITE JUDICIAIRE

À la fin du point de presse, le ministre Moreau a assuré à La Presse que les poursuites judiciaires contre le géant américain propriétaire de l'ancien incinérateur à déchets, Clean Harbours, ne sont pas terminées. La saga devant les tribunaux remonte à 2007.

« Il y a eu un processus de mise en demeure. Les négociations, qui avaient commencé en 2014, ont achoppé il y a environ un mois. Le processus judiciaire se poursuit », a-t-il soutenu.

La «honte» environnementale en quelques dates

1968-1969 : Les eaux de surface et souterraines sur le territoire de la ville de L'Assomption sont contaminées par le dépôt et l'entreposage de déchets huileux au dépotoir Hétu et Thouin. Le gouvernement octroie un permis à Lasalle Oil Carriers Inc. pour déverser et entreposer des déchets liquides dans les anciennes lagunes de Mercier. Aucune étude hydrogéologique n'a été effectuée au préalable.

1970 : Avec le feu vert du gouvernement, Goodfellow (aujourd'hui Laidlaw) acquiert les lagunes de Mercier pour y construire un incinérateur afin de traiter sur place les déchets.

1981 : Des études démontrent l'existence d'une zone fortement polluée de 2 kilomètres carrés et d'une zone moins contaminée de 30 kilomètres carrés.

1991 : Un rapport d'enquête du ministère de l'Environnement fait état de la découverte de 573 barils et 355 condensateurs contaminés par des BPC enfouis près des lagunes.

1994 : Rapport d'enquête du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement (BAPE) recommandant, entre autres, d'excaver partiellement pour extraire les contaminants.

2007 : Un nouveau rapport indique qu'il ne faut pas excaver en raison des différents risques.

2012 : Les municipalités de Mercier, Châteauguay et Sainte-Martine entreprennent des démarches judiciaires exigeant la restauration du site. L'usine de confinement des contaminants des lagunes de Mercier, reprise cette année-là par le gouvernement, est mise à niveau.

Source : archives municipales