Le port de carrés jaunes à la séance du conseil municipal d'Outremont pour protester contre l'affluence d'autobus scolaires juifs dans l'arrondissement fait froncer des sourcils à Montréal.

L'incident des carrés jaunes, qui rappellent l'étoile de David que devaient porter les juifs sous le régime nazi, constitue le plus récent épisode des frictions entre certains résidants d'Outremont et les membres de la communauté hassidique, en croissance démographique dans cet arrondissement montréalais.

Un enregistrement vidéo de la séance du conseil de lundi, mis en ligne par l'arrondissement, montre une résidante arborant le carré jaune s'adresser au maire et aux conseillers. Ginette Chartre soutient que le carré jaune est un symbole des autobus scolaires de la communauté hassidique qui nuisent à sa quiétude. Elle soutient que ces autobus bloquent les rues 12 mois par année, un privilège accordé à certains citoyens seulement, dit-elle.

S'adressant au maire, Mme Chartre soutient que le carré jaune réfère à la couleur des autobus scolaires, et n'a rien à voir avec l'Histoire. Elle estime par ailleurs que pour aller de l'avant, il faut à un moment donné mettre le passé derrière soi.

Jennifer Dorner, une résidante d'Outremont qui était présente à la séance du conseil, s'est dite outrée par ces sept ou huit personnes qui portaient le carré jaune. Mme Dorner admet que les seuls autobus scolaires qui roulent 12 mois par année sont ceux de la communauté hassidique, mais elle soutient que cette circulation ne constitue pas une nuisance. Elle raconte par ailleurs qu'une amie hassidique s'est mise à pleurer lorsqu'elle a vu les carrés jaunes, lundi soir. «Je ne crois pas qu'ils réalisent l'impact réel causé sur la communauté.»

Référendum de novembre

Des tensions surgissent périodiquement dans cet arrondissement montréalais entre une poignée de résidants et les juifs hassidiques - et la population en général est divisée. Les citoyens reprochent souvent à ces juifs très pratiquants de ne pas se mêler aux autres résidants.

En novembre 2016, lors d'un référendum, les citoyens d'Outremont ont voté à 56,5 pour cent en faveur d'un règlement qui prévoit d'interdire tout nouveau lieu de culte sur l'avenue Bernard, une artère importante de l'arrondissement. La mairesse martelait à l'époque que ce règlement ne visait aucune communauté en particulier, mais les juifs hassidiques venaient d'obtenir un permis pour y construire une synagogue.

Alex Werzberger, un membre de la communauté hassidique, n'était pas à la réunion du conseil, lundi soir, mais il rappelle que les juifs ont, de tout temps, fait face à ce genre d'attitudes - parfois bien plus graves, évidemment. «Qu'est-ce qu'on doit faire, maintenant? Disparaître?», demande-t-il en entrevue.

M. Werzberger soutient par ailleurs que la plupart des résidants d'Outremont n'ont aucun problème avec les hassidim. «Je vis ici depuis 1950: il n'y a pas de vrais problèmes. Nous formons une communauté très paisible. Quel est le taux de meurtre ou d'ivresse dans la communauté hassidique?»