Un bras de fer se dessine entre l'arrondissement montréalais du Sud-Ouest et le CN, qui n'a toujours pas payé les 500 000 $ que lui réclame l'arrondissement pour un permis d'occupation de l'espace public dans la rue Saint-Rémi, où la compagnie ferroviaire a entamé un important chantier cet été. Des fonctionnaires ont même indiqué le CN de fermer le chantier s'il ne payait pas, une menace qu'a toutefois retirée le maire de l'arrondissement Benoit Dorais.

Décrivant le CN comme un « mauvais citoyen corporatif », M. Dorais dit avoir toujours bon espoir d'être payé, mais il affirme qu'il est prêt à aller devant les tribunaux s'il le faut.

L'histoire a débuté au mois d'août. Le CN devait faire des travaux au tunnel de la rue Saint-Rémi, qui passe sous sa voie ferrée. Des travaux réclamés par l'administration du Sud-Ouest.

Photo David Boily, Archives La Presse

Benoit Dorais, maire de l'arrondissement du Sud-Ouest.

Mais d'autres entités prévoyaient aussi des travaux dans cette rue : l'arrondissement et le consortium KPH-Turcot, qui doit y modifier la configuration en raison du vaste chantier de l'échangeur, juste à côté. Cela crée des entraves majeures dans cette rue, et ce, pour des mois.

« On a demandé au CN d'attendre la ville-centre pour faire ses travaux afin de ne pas multiplier les chantiers », explique Marie Otis, directrice de cabinet du maire Dorais.

Ainsi, à la mi-août, le CN a commencé à installer son chantier, impliquant d'importantes entraves, notamment pour y laisser machinerie et matériaux.

Et comme pour tout chantier, les fonctionnaires de l'arrondissement ont délivré au CN un permis d'occupation du domaine public. Il s'agit d'un gros et long chantier. La facture envoyée au CN était salée. Environ 500 000 $.

Le CN aurait alors informé les fonctionnaires qu'il ne comptait pas payer. Ce à quoi ceux-ci auraient répondu que s'ils maintenaient leur position, à la fin du mois, l'arrondissement fermerait le chantier.

Intervention du maire

C'est à ce stade que Benoit Dorais s'est mêlé du dossier. Il aurait demandé aux fonctionnaires de ne pas fermer le chantier même si le permis demeurait impayé. Selon nos informations, ceux-ci n'ont pas apprécié sur le coup l'intervention du maire, considérée comme une entorse aux procédures habituelles.

Mais le maire dit avoir agi ainsi pour le bien de ses citoyens.

« Les gens dans ce secteur de la ville en arrachent. Ils sont meurtris par le chantier de l'échangeur Turcot. Ils subissent la poussière », explique-t-il.

Les travaux ont donc pu commencer. Ils devaient durer jusqu'en octobre. Mais à ce jour, pas un dollar n'a été versé à l'arrondissement.

« Nous poursuivons notre analyse du dossier », a simplement commenté à La Presse Jonathan Abecassis, directeur des relations avec les médias au CN.

Bon contact

Le maire Dorais n'hésite pas à le dire, le CN s'est parfois comporté « en mauvais citoyen corporatif ». Mais il ne veut pas encore parler de litige entre son arrondissement et la compagnie ferroviaire, bien présente dans presque tout le Sud-Ouest. Il dit avoir eu un bon contact avec le gestionnaire attitré au dossier.

« À la fin des travaux, on veut que ça soit payé. [...] Mais je ne perds pas patience », dit le maire.

« Le service du contentieux a été mis dans la boucle », ajoute cependant sa directrice de cabinet, Mme Otis.

Elle indique qu'il n'est pas fréquent que des permis d'occupation de cette ampleur soient délivrés. Il faut dire que les maîtres d'oeuvre de grands chantiers étant souvent des branches du gouvernement, de la Ville ou des services de distribution d'eau ou d'électricité, ceux-là n'ont pas à payer leur permis, ce qui n'est pas le cas du CN depuis sa privatisation.

« Les entreprises de construction dans Griffintown qui ont parfois fermé des bouts de rue pour longtemps ont reçu aussi de grosses factures et ont payé. Nous faisons 3 millions par année en recettes avec les permis d'occupation du domaine public. C'est donc majeur », conclut Mme Otis.